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27/06/2005

AKP se tourne vers les Turcs de l'Europe

L’AKP, le parti au pouvoir à Ankara a secoué l’actualité en Turquie en voulant d’un côté renouer les liens avec l’organisation européenne de Milli Görüs et d’un autre côté en cherchant à lui trouver une alternative.

Par Murat Daoudov, 21 avril 2003

DIRECTIVE AU SUJET DE MILLI GÖRÜS SUSCITE LA POLEMIQUE

Plusieurs quotidiens turcs ont participé à la polémique suscitée par la directive du ministre turc d’affaires étrangères Abdullah Gül, adressée aux ambassades turques à l’étranger, qui les invitait à renouer les contacts avec les milieux de Milli Görüs et de Fethullah Gülen. Alors que les journaux comme AKSAM et SABAH affirmaient que la directive mentionnait explicitement l’organisation de Milli Görüs et les écoles dites " de Fethullah Gülen ", d’autres comme ZAMAN et STAR parlaient plutôt de l’allusion à ces organisations faite dans ladite directive. Quoi qu’il en soit, elle a provoqué les remous dans le camp des " laïcs " qui sont très sensibles à toute tentative de réhabilitation des organisations musulmanes turques basées en Europe (notamment Milli Görüs, perçue comme ennemi du système, et les fondations proches du mouvement de Fethullah Gülen, chef spirituel d’une grande confrérie tombée depuis dernières années en défaveur d’Ankara).

Ministre Gül, qui dans sa concurrence avec Necmettin Erbakan, le leader spirituel du mouvement Milli Görüs vise, selon le journal SABAH, à renforcer les positions du parti AKP auprès des milieux conservateurs musulmans, a donné le 16 avril dernier le signal aux ambassades à l’étranger de renouer et renforcer les contacts avec Milli Görüs. La fin du délai de déchéance des droits civiques de Necmettin Erbakan et son retour à la vie politique active inquiète la direction du parti au pouvoir. La visite récente de ministre d’Etat chargé des affaires religieuses (qui cumule ce mandat avec les affaires touchant aux communautés turques et turcophones) Mehmet Aydin en Allemagne serait à l’origine de cette initiative, car ce dernier y a dû écouter les griefs des dirigeants de Milli Görüs qui se plaignaient d’être négligés et ne pas être admis comme interlocuteurs par les ambassades. Le ministre Aydin de son retour à Ankara en a fait le rapport au gouvernement, qui lui a voulu remédier à cette situation.

Interrogé au sujet de la directive, le ministre Gül a tenté de minimiser l’importance de la directive en disant qu’elle n’était pas la première de ce genre (" une routine ") et que la tradition de conseiller aux missions diplomatiques à l’étranger de se rapprocher avec les communautés turques existait déjà. Mais ici, le gouvernement a surtout voulu prévenir que les organisations des ressortissants turcs, négligées jusqu’ici par l’Etat, soient poussées dans leur isolement vers d’autres organisations et d’autres Etats. " Le but est de les rendre fidèles à l’Etat turc ". Pour Abdullah Gül, il va de soi que les ambassades suivent de près les formations qui sont manifestement hostiles à la Turquie, mais les organisations qui ne sont pas dangereuses (comme MG et autres), il ne faut pas les rejeter et pousser vers les autres. " Sinon, les services de renseignement et d’autres organisations veulent les manipuler. Et là on perd des grandes masses. Ceci est également valable pour les organisations de gauche et même pour certaines associations des Alevis (minorité religieuse en Turquie) ". Ministre Gül, répondant au quotidien SABAH sur la reconnaissance de MG comme organisation extrémiste et terroriste dans le cadre de l’accord avec l’Allemagne, a rappelé qu‘il était " un de ceux qui connaissaient de près l’organisation de Milli Görüs. Si elle va soutenir les terroristes, nous n’allons pas tolérer cela. Il ne faut oublier pourquoi nous l’avions quittée et créé un parti politique différent ".

Le porte-parole du ministère turc d’affaires étrangère Hüseyin Diriöz a fait un communiqué de presse dans lequel il a défendu la dernière directive, qui comme les précédentes visait à " rapprocher les compatriotes et l’Etat ". Sans oublier de souligner que l’Etat se positionnait de manière neutre et observait la même distance avec toutes les organisations, sans faire de distinction sur base de religion, race où origine géographique. Le communiqué a également fait le point sur les écoles, qui fonctionnaient selon les législations des pays d’accueil et en conformité avec les règles sur place, et que les relations entre elles et les missions diplomatiques turques s’entretenaient dans le cadre des principes décrits plus haut. Selon le journal AKSAM, la directive en question demandait aux ambassades de traiter les écoles des fondations proches de Fethullah Gülen (dites " les écoles des Nurcular ") comme des établissements officiels.

Le premier ministre Erdogan n’a pas échappé lui non plus aux interpellations dans ce dossier brûlant. Invité de la télévision ATV, il a déclaré que ladite direction ne citait aucune organisation en particulier, mais toutes les organisations non dangereuses. " Pourquoi nos ambassades ne seraient-elles pas en bon contact avec les formations qui ne sont pas impliquées dans les activités terroristes et qui défendent les intérêts de notre pays ? " a-t-il dit.

" Il y a beaucoup d’organisations des travailleurs turcs à l’étranger. Si elles fonctionnent bien, c’est notre avantage. Mais nous n’avons pas su jusqu’aujourd’hui profiter de cet avantage. Il faut que nous soyons en contact continu avec ces formations. Et peut-être elles vont nous aider à avoir un impact sur les administrations des pays d’accueil. Elles doivent s’intégrer aux pouvoirs centraux et locaux de ces pays, et pour cela elles doivent se coordonner. Mais nos ambassades se plaignent de ne pas pouvoir réunir ces associations. Il faut que nous les réunissions pour le bien de nos compatriotes là-bas et peut-être nous aurons ainsi la possibilité de les propulser aux parlements sur place. "

AKP VEUT UNE ALTERNATIVE A MILLI GÖRÜS

Selon les journaux turcs STAR, AKSAM et MILLIYET, les dirigeants du parti AKP, secoués par la crise liée à l’inclusion de l’organisation Milli Görüs dans la liste des organisations terroristes et dangereuses en Allemagne et par les réactions tant de la part du parti Saadet (SP, le parti de Necmettin Erbakan) que de sa propre base, envisagent de créer parmi les Turcs de l’Europe une formation qui serait une alternative à l’organisation de Milli Görüs. Pour rappel, Milli Görüs avait été inclue dans la liste des organisations terroristes et dangereuses dans le cadre de la Convention entre l’Allemagne et Turquie pour coopération en matière de la sécurité, mais en a été exclue suite aux discussions qui ont eu lieu au sein du parti AKP. Le premier ministre turc Tayyip Erdogan a expédié le vice-président de son parti, chargé des relations extérieures, Saban Disli en Allemagne. Le choix de la ville de Cologne ne doit rien au hasard, c’est le fieffe de la Milli Görüs européenne. Il est chargé de préparer la base pour une ouverture de la représentation de AKP et soumettre son rapport à son président.

Mais le vrai but de cette action est, selon les quotidiens turcs, de préparer le terrain pour attirer la base de MG et la " libérer " de l’influence de Necmettin Erbakan. La plupart des membres de la MG qui compte encore 85 mille d’affiliés et qui est la plus importante organisation des musulmans turcs en Europe, sont favorable à l’ancien président du pari REFAH Necmettin Erbakan.

Surtout après la signature par le premier ministre Erdogan de la convention avec l’Allemagne, qui entre autres, reconnaissait la MG comme une organisation dangereuse, l’AKP a subi des réactions de la part de la Milli Görüs et de sa propre base. Les membres de Milli Görüs, qui lors des élections du 3 novembre dernier ont voté majoritairement en faveur de l’AKP, ont tendance d’entourer Necmettin Erbakan depuis que ce dernier s’est relancé en politique. Erdogan tente, en envoyant Saban Disli en Europe, de regagner les cœurs des sympathisants de Milli Görüs.

Saban Disli, chargé de la mission de préparer le terrain pour une organisation qui représenterait l’AKP, passera après Cologne à Stuttgart, Berlin, Munich. Il a été appris que sur le plan structurel l’organisation ne sera pas une fondation ou association, mais plutôt une représentation. Au même temps, le journal MILLIYET évoque " l’Union " ou " l’Association des Démocrates Conservateurs " comme probable appellation de la nouvelle structure. Les représentations extérieures, qui sont prévues dans les statuts du parti, vont ouvrir, d’après la presse turque, dans les pays où il y une communauté turque, notamment en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en France, en Suisse et en Suède. Dans un deuxième temps elle vont ouvrir dans plusieurs pays allant des USA et Grande-Bretagne jusqu’à l’Afghanistan, l’Irak et l’Indonésie, sans oublier les pays de l’Asie centrale. Elles seront chargées des activités de lobbying et de propagation de la vision de l’AKP parmi les Turcs à l’étranger.

Murat Daoudov

publié sur www.Suffrage-Universel.be

00:50 Posted in Article | Permalink | Comments (0)

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