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27/06/2005

Fondation Roi Baudouin - Moteur ! 2005

FRB: Projets soutenus

"Former les citoyens de demain"

Murat Daoudov souhaite mettre sur pied un cycle de séances de formation/information à destination des jeunes immigrés, pour les aider à acquérir des connaissances en matière de législation belge sur l’immigration, sur le système politique belge, ses institutions, son système électoral, sur la vie associative et la participation citoyenne organisée… Sa motivation première est d’inciter des ‘nouveaux migrants’ à devenir des citoyens actifs de demain et à aider leurs groupes ou communautés.

Individu ou organisation soutenu(e) : Murat Daoudov

http://www.kbs-frb.be/code/page.cfm?id_page=127&id=5374


Les " nieuwkomers " sont-ils parents pauvres du processus électoral musulman?

Suffrage-Universel.be, 17.02.2005


Le règlement électoral musulman publié récemment au Moniteur ne laisse pas indifférent, pour diverses raisons, plusieurs observateurs.

Ne me positionnant ni dans le camps de ceux qui ont soutenu ardemment le processus, ni dans celui qui a tiré à boulets rouges (je voulais en effet voir le verre à moitié plein), je souhaite partager avec les lecteurs une critique de ce règlement qui est, à mes yeux, révélateur d’une vision archaïque de la société et de la communauté musulmane de Belgique. Le constat d’un certain esprit qui, pour moi, a présidé à la rédaction de ce document a motivé ma décision personnelle de ne pas voter. La source de ma déception se trouve donc précisément dans le règlement, critiquable sur au moins un point.

Il s’agit des conditions prévues pour les candidats et précisément de l’obligation (outre les cinq ans de résidence) de bénéficier d’un droit d’établissement.

Encore au stade préparatoire de ce processus, j’avais contacté la Commission chargée du renouvellement, via un de ses membres, pour poser diverses questions relevant d’un domaine qui m’est cher, celui du droit des étrangers. Ainsi, j’ai été informé que sera accepté, pour la notion de résidence, tout séjour couvert d’un titre de séjour légal. C’est une condition de plus par rapport aux critères des élections de 1998 (où il était requis simplement d’avoir son domicile en Belgique depuis 1 ou 5 ans). Mais bon, ce n’est pas là mon point de critique.

Par contre, à ma grande surprise, le texte du règlement, une fois affiché sur le site de la Commission, stipulait que les candidats doivent, outre les cinq ans de résidence, bénéficier de droit d’établissement. J’ai immédiatement repris contact avec le même membre de la Commission pour attirer son attention sur le caractère discriminatoire et non raisonnable (parce qu’en principe une discrimination est permise là où elle est objective et raisonnable) de cette exigence. Alors qu’en 1998 aucune condition spécifique par rapport à la nature de droit de séjour de candidat ne figurait parmi les conditions, la Commission a mis ainsi un filtre fort en faisant jouer au titre de séjour des intéressés un rôle décisif.

On voit ici que la " régulation des flux migratoires " a fait son entrée sur la scène de la gestion du temporel du culte. Mais bon, il ne faut pas trop s’en étonner. Après tout, c’est dans l’air du temps. Quand le Danemark devient un lieu de pèlerinage…


Mais, y-a-t-il là une discrimination ?

C’est évident. Une personne qui bénéficie d’un droit de séjour illimité (réfugié reconnu, régularisé à titre définitif, apatride…qui a une " carte blanche ") qui vit en Belgique depuis plus de 5 ans et qui remplit toutes les autres conditions, ne pourra pas se porter candidat. Par contre, une personne qui bénéficie d’un établissement (et a donc une " carte jaune " de 5 ans) pourra le faire.

Cette discrimination est-elle objective et raisonnable ?

Pas du tout, puisque aujourd’hui il n’y a pratiquement pas beaucoup de différence en droit entre les bénéficiaires de séjour illimité et de l’établissement. Sans dire que les réfugiés reconnus sont même parfois plus privilégiés que les autres étrangers. Cette exclusion des bénéficiaires du droit de séjour illimité ne repose sur aucun motif raisonnable.

Exclure un musulman réfugié ou régularisé, qui vit en Belgique de plus de 5 ans, parce qu’il n’a pas d’établissement est d’autant plus arbitraire que l’établissement est une faveur accordée sur demande, après 5 ans de résidence et à condition d’avoir déjà obtenu le "séjour illimité ". Et justement, il y a un tas de gens qui vivent là depuis plus 5 ans et ne font pas ou ne veulent pas faire de demande d’établissement. A quoi bon la faire s’il n’y a quasi pas de différence entre le statut actuel et le statut sollicité ?

Mon interlocuteur m’a semblé convaincu de ce raisonnement et a promis d’y sensibiliser la Commission. Ma proposition était que, si on tient tant à ce que seulement ceux qui ont un séjour " solide " puissent se porter candidat, il fallait alors, au moins, modifier la phrase comme suit : " …bénéficient d’un droit de séjour illimité ou d’établissement ". Mais pas de chance pour les régularisés, les réfugiés et autres apatrides ! On m’a répondu que la Commission n’y avait pas vraiment pensé, mais maintenant il était trop tard pour changer quoique ce soit, car les formulaires étaient déjà en passe d’être envoyés à l’imprimerie.

Mais on m’a rassuré que les candidats potentiels pouvaient déposer leurs candidatures et la Commission les examinerait au cas par cas et accorderait une dérogation/ exception. Une faveur donc.

Avec tout mon respect, je ne pouvais pas ne pas être déçu par ce que j’apprenais. Que l’on insère une discrimination dans le règlement et qu’on l’entérine, pour raison des échéances de l’imprimerie, c’est difficile à comprendre. Surtout si on vous dit que vous pourriez toujours demander une faveur là où ça aurait dû être un droit.

C’est ici que je souhaite toucher au fond du sujet. Cette situation n’est en effet qu’une belle illustration du fait que les pouvoirs publics sont encore et toujours dans les vieilles conceptions de l’ "immigré", "allochtone", "musulman" d’il y a vingt- trente- quarante ans. Le musulman de Belgique, c’est le travailleur venu dans le années 60-70 ou ses "collatéraux" (regroupés familiaux qui l’ont suivi et suivent toujours). Il est donc déjà devenu belge ou a sa carte jaune. Point. Pas d’autres catégories…..

Je suis triste d’observer (pour avoir été assesseur lors des élections de 1998) qu’en 2004-2005 les décideurs sont mentalement encore là, en 1998, avec les vieilles conceptions plus du tout up-to-date. La nouvelle réalité sociale, celle de la présence des nouvelles communautés immigrées n’est apparemment pas encore intégrée mentalement pas les pouvoirs publics.

Le musulman aujourd’hui n’est plus exclusivement turc ou marocain. La communauté musulmane de Belgique d’aujourd’hui, ce sont aussi les Tchétchènes, les Ouïgours, les Azéris, les Kazakhs et les autres…Peut-on ignorer cette nouvelle donne ?

On pourrait me rétorquer que personne n’est exclu, que toute le monde est bienvenu et peut s’inscrire…

Oui, mais si on ne prend pas du tout en compte la spécificité de ces nouvelles communautés, si on ne leur crée pas un minimum de conditions pour qu’elles puissent aussi avoir voix au chapitre, c’est réduire à zéro leur chances d’accéder à cet organe censé les représenter aussi !

La spécificité de ces nouvelles communautés réside justement dans le fait qu’elles sont relativement nouvelles. Ces communautés sont là depuis à peu près 1999-2000, elles sont souvent composées des réfugiés et des régularisés. Mais elles sont musulmanes et par conséquent ont aussi besoin de cours de religion, de mosquées, d’imams etc.

Mais comment vont-elles faire, dans les conditions actuelles, pour propulser un des leurs dans l’organe représentatif des musulmans ? Il faut non seulement qu’il se trouve parmi elles des gens capables et parlant couramment la langue, qui ont déjà les 5 ans de résidence légale (d’accord avec le principe, même si cela réduira considérablement le nombre des potentiels candidats), mais de plus il faudra qu’ils aient leur "établissement". Ils auront beau trouver parmi eux des camarades remplissant toutes les autres conditions, résidant depuis 5 ans et ayant obtenu un séjour définitif, mais ils ne seront de toute façon pas éligibles, parce qu’on n’avait pas pensé à leurs communautés quand on prenait la plume pour écrire le règlement.

Mais bon, on leur dira qu’ils pourront demander une faveur à la Commission. Et ils devront accepter cette perspective de traitement "de seconde zone".

Cette histoire a laissé un goût amer parce que je m’étais justement investi au début dans l’information de ces nouvelles communautés par rapport au processus. Croyant de mon devoir de les informer et de les inciter à participer activement dans cet exercice citoyen, j’ai voulu apporter ma pierre à l’édifice. Ayant préparé un texte présentant le processus dans son contexte historique, j’ai traduit en russe et diffusé les trois premières communications de la Commission. Jusqu’à ce que j’aie pris connaissance du règlement, avec lequel le chemin de ces nouveaux musulmans de Belgique vers une représentation devenait très épineux.

Oui, ils pourront voter, ça oui. Il ne faut finalement, dira-t-on, qu’un un an de résidence légale. Mais seront-ils motivés à s’engager dans un processus dans lequel ils n’auront que peu de chance de mettre un candidat et où leurs votes iront finalement dans le pot commun, à d’autres communautés plus anciennes et mieux prises en compte ?

Dans ces conditions, faire une communication envers ces nouvelles communautés ressemble à faire la publicité pour une marchandise que les destinataires de message ne pourront que difficilement acheter. Le seuil des prix étant trop élevé pour leur portefeuille.



Murat Daoudov (daimohk@yahoo.com)
Membre du Conseil des Bruxellois d’origine étrangère

16.02.2005

P.S. Quant à l’auteur, il n’avait pas l’intention de poser sa candidature. Mieux vaut le préciser.


http://fr.groups.yahoo.com/group/suffrage-universel/message/2546

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Turcophones : une famille élargie / Turkstaligen: een grote familie?

Dossier : « Voyage au Türkbeekistan ». Politique, octobre 2004

Ouïgours, Azéris, Kirghizes, Tatars ou Bachkirs, toutes ces minorités installées en Belgique ont la particularité de partager un dialecte turcophone sans être originaires de Turquie. Comment s’organisent-ils et quels liens entretiennent-ils avec la communauté turque ?

Murat Daoudov           
collaborateur du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme
(Observatoire des migrations)

 

L'effondrement de l'Union soviétique et l'émergence d'un espace turcophone qui s'étend de l'Europe de l’est à la Chine a suscité le grand intérêt de la Turquie où beaucoup ont vu dans ce bouleversement une occasion historique pour le développement des idées panturquistes[1], gardées au placard durant le règne soviétique sur l’Asie centrale et le Caucase. Durant les années nonante la Turquie a déployé de grands efforts pour retisser des liens avec ceux que les Turcs considèrent leurs «petits frères». Les sommets des chefs d’États  des pays turcophones, les émissions des chaînes de télévision turques sur ces régions et les investissements économiques conjugués à une ouverture massive de collèges et d‘universités[2] dans des régions turcophones visaient à cimenter le rapprochement des nations sœurs. Par ailleurs, un important programme d’Ankara permet à des dizaines de milliers de jeunes turcophones d’étudier en Turquie à l’aide d’une bourse étatique. Ce programme, outre sa vocation d’aide au développement, poursuit le but de former des nouvelles élites parlant le turc pour remplacer dans leurs pays des élites éduquées en russe. Vu ces liens historiques et ethniques, la Turquie était considérée par l’Occident comme un facteur - et un acteur - stabilisateur important pour la région dont il  espérait qu’elle adopte le modèle turc fondé sur la laïcité et l’économie libérale.

Ces interactions n’ont certainement pas été sans effet sur des diasporas turques en Europe qui ont accueillis avec beaucoup d’intérêt et de sympathie les nouveaux immigrés turcophones. Pour la plupart des Turcs d’Europe, c’est l’arrivée progressive des migrants et demandeurs d’asile venant de l’est qui a permis la découverte de ces «frères de sang» dont ils ont tant entendu parler dans des médias turcs. Mais, naturellement, ce phénomène suscitait plus d’intérêt chez ceux parmi les Turcs qui, de par leurs convictions politiques ou spirituelles, y étaient plus sensibles que les autres. C’est ainsi que, parmi les fractions turques, la Fédération turque de Belgique (nationaliste et pantouraniste) se distinguait par le soutien aux nouveaux turcophones. Et même si ce soutien ne se limitait pas toujours aux ethnies sœurs[3] - il devenait d’autant plus «légitime» vis-à-vis des communautés proches par le sang et par la langue - quand elles ont commencé à arriver en Belgique vers 1998.

La communauté turque, réputée pour sa charité, a bien aidé les nouveaux turcophones à surmonter les difficultés de l’exil dans la période d’adaptation. Dans la plupart des cas, c’est dans des quartiers turcs que ces nouveaux migrants ont trouvé du travail ou un logement à prix abordable. La communauté turque a également partagé sa grande expérience associative pour aider ces nouveaux arrivants à s’organiser en associations et ainsi de demander des subsides. Précisons tout de même pour éviter certains raccourcis que les nouveaux turcophones, pour qui la Belgique est souvent le premier lieu de rencontre avec des Turcs, ne sont pas en mesure de connaître la complexité des tendances de ces derniers. En revanche, pour les Turcs ce sont souvent des considérations idéologiques (panturquisme, fraternité religieuse, adversaires géopolitiques communs…) qui constituent la force motrice de cet accueil.

 

Les Ouïgours

Les premiers turcophones qui se sont faits remarquer par l’opinion publique belge et par la communauté turque étaient les Ouïgours, venus essentiellement du Kazakhstan et de la Kirghizie.

Les Ouïgours sont un peuple originaire du Turkestan oriental, aujourd’hui la région autonome du Xinjiang en République populaire de Chine, occupé depuis 1949. Les Ouïgours représentent un des plus importants peuples turcophones dépourvus d’État. Ils comptent entre 7 et 10 millions d’âmes en Chine, laquelle n’a pas ménagé ses efforts pour réduire ce peuple, y compris pas la politique de l’installation massive de Chinois (des Hans) dans la région. Aujourd’hui le peuple ouïgour représente moins de 50% des habitants de la région autonome. Suite aux répressions chinoises débutant dans les années cinquante, de nombreux Ouïgours commencent à fuir la région pour se réfugier d’abord au Kazakhstan, en Kirghizie, en Ouzbékistan soviétiques (où ils sont aujourd’hui environ 500.000), puis en Turquie (avec 15.000 Ouïgours). Enfin, aujourd’hui c’est leur deuxième vague d’exil, [cette fois-ci] vers l’Europe, en l’espace d’un demi-siècle.  

Le durcissement radical de la politique d’asile en Belgique à partir de janvier 2001 a été suivi par l’expulsion médiatisée et controversée d’une trentaine de demandeurs d’asile par  avion vers le Kazakhstan, parmi lesquels plusieurs Ouïgours. Cette action allait provoquer un effet secondaire inattendu : l’intérêt de la société civile pour la situation des Ouïgours et les droits de l’Homme en Asie centrale. Un colloque organisé en janvier 2001 au Sénat portait d’ailleurs spécifiquement sur la situation de cette communauté en exil. De plus, une série d’articles dans la presse ont également permis d’y attirer l’attention. À la même période survient un fait douloureux, le suicide à Dessel d’un jeune Ouïgour, très affecté par l’atmosphère et la peur d’expulsion entretenue par les images musclées véhiculées par les médias. Le véritable choc qui s’abat alors sur cette communauté mobilise la presse, la société civile, un député et la communauté turque. Tous viennent témoigner leur solidarité.

Cette situation motive les Ouïgours de Belgique à s’organiser. Ainsi les premières associations d’Ouïgours se constituent dès 2001 (« Organisation de la jeunesse ouïgoure » à Anderlecht) et en 2002 («Centre culturel ouïgour » à Schaerbeek et « Origine » à Verviers). Ce processus, après quelques échecs et recompositions, aboutit à la création en mai 2003 du Centre culturel ouïgour «Ymyt - Oemoet» (espoir) à Anvers, présidé par Tursun Machpirov et soutenu par le centre local De Wijk. La communauté ouïgoure, de Belgique dont les premiers membres sont arrivés en 1998-1999, compte aujourd’hui environ 500 personnes. La première moitié est originaire du Kazakhstan, la deuxième est composée d’Ouïgours de la Kirghizie mais aussi de l’Ouzbékistan, enfin dans une moindre mesure de la Chine. Installés majoritairement à Anvers et Bruxelles, les Ouïgours sont dans leur quasi-totalité des demandeurs d’asile mais rares sont ceux qui l’obtiennent. Ecrasés entre la superpuissance de la Chine et les régimes autoritaires de l’Asie centrale, les Ouïgours se croient sacrifiés sur l'autel de la real-politique[4]. Malgré tout, ils veillent à préserver leur culture, comme par exemple avec le Centre Oemoet. Ce centre fait partie du Kurultaï (congrès) international des Ouïgours basé à Munich, créé en avril 2004 suite à la fusion du Congrès national du Turkestan de l’est et le Congrès mondial de la jeunesse ouïgoure.

En ce qui concerne leurs premiers pas en Belgique, les Ouïgours ont reçu le plus grand soutien de la part des Turcs et en particulier de la Fédération turque de Belgique (accompagnement dans la recherche de logement et du travail, manifestations folkloriques, campagne de sensibilisation au sein de la communauté turque, soutien d’un avocat turc pour des Ouïgours risquant l’expulsion). Aujourd’hui, quand la communauté acquiert une expérience associative suffisante, elle opère avec l’aide des acteurs publics (De Wijk). Les contacts avec les associations turques sont moins fréquents. Par ailleurs, les Ouïgours pratiquants vont prier dans les mosquées turques et participent avec les Turcs aux fêtes traditionnelles religieuses[5]. Sur le terrain médiatique, outre la multitude des sites internet ouïgours - le Centre Ymyt-Oemoet a aussi le sien (ymyt.com) - les Ouïgours regardent la télévision kazakhe par satellite et, par ailleurs, un bulletin d’informations est édité à Munich en ouïgour (écriture arabe), en anglais, en turc et bientôt en russe.

 Les Azéris

Une autre communauté turcophone importante qui fait parler d’elle dans la presse turque locale sont les Azéris. La diaspora azérie compte plus de deux millions de personnes dans l’espace de l’ex-URSS, essentiellement en Russie et en Ukraine et de plus en plus en Europe. En ce qui concerne la communauté azérie de Belgique, elle se divise en deux  : des Azéris de Turquie (de la province d’Igdir), arrivés en tant que travailleurs turcs dans les années 1960-70 et des Azéris venant de l’Azerbaïdjan. La communauté des Azéris de l’Azerbaïdjan s’est constituée depuis 1998-1999. Ils sont aujourd’hui à peu près deux cents  personnes (contre environ 2.000 Azéris turcs d’Igdir). Seule une dizaine de familles a obtenu un séjour définitif (statut de réfugié, régularisation). L’écrasante majorité est composée de demandeurs d’asile mais aussi d’environ 10 à 15% de clandestins (des demandeurs d’asile déboutés ou des «touristes»). Il y a aussi un petit nombre d’étudiants ou de travailleurs qualifiés arrivés avec contrat. La plupart des Azéris est  installée à Bruxelles et Anvers.

Pour ce qui est de la vie associative, ce sont d’abord des Azéris turcs qui ont fondé en 1993 la première association (parmi lesquels Ferhat Calisan, aujourd’hui président du Comité des parents turcs de Molenbeek). Ensuite vient vers 1998 le «Centre culturel et d’information d’Azerbaïdjan» [6], dirigé par Bülent Gürçam, un homme d’affaire turc de souche azérie, ancien journaliste des quotidiens turcs Tercüman et Hürriyet et ancien chauffeur de l’ambassade d’Azerbaïdjan. Parallèlement, Gürçam fonde en 1999 l’«Alliance belgo-azérie Shur» à Uccle et enfin, en 2000, l’association «la Maison d’Azerbaïdjan» à Molenbeek avec des demandeurs d’asile d’Azerbaïdjan. Cette dernière avait notamment organisé une exposition de photos sur la Place de la Monnaie à Bruxelles (février 2003) commémorant le 11-ème anniversaire du massacre au village Khodjali où des centaines de civils ont été exterminés par la guérilla arménienne lors du conflit autour de Nagorny Karabakh. Cette manifestation avait suscité un grand intérêt dans la communauté turque.

Au début 2003, l’association «Odlar Yurdu» (pays du feu) a fait une apparition brève et mouvementée. Elle fut fondée par Adalet Guliyev, ancien réfugié naturalisé, et Lokman Uzel, ressortissant turc des Pays-Bas. Leur association a mené une série d’actions de protestation à l’encontre ses autorités arméniennes, accusées de soutien aux massacres des Azéris dans le Nagorny Karabakh, notamment un rassemblement en février 2003 devant l’ambassade d’Arménie, soutenu par le BTKK (Conseil de coordination turc de Belgique). Après une tentative d’assassinat, attribuée aux Arméniens par les sites turcs et azéris, Guliyev a mis fin à sa carrière politique.

 

Aujourd’hui la majorité des Azéris est organisée autour du «Centre Européen des Azéris»[7], créé depuis le début 2004 par Fatma Aliyeva et son époux, Bahri Yildirim, homme d’affaire turc originaire des Pays-Bas. Actuellement, l’association compte environ 150 membres, dont une écrasante majorité d’Azéris de l’Azerbaïdjan, mais aussi quelques-uns de Turquie. Ce centre a notamment organisé une manifestation en février dernier au  rond-point Schuman pour commémorer le massacre de Khodjali, une action soutenue par la BADD (l’Association de la pensée d’Atatürk de Bruxelles) et le BTKK. Outre des objectifs sociaux et culturels, cette formation vise à sensibiliser l’opinion publique au sort des réfugiés azéris du Nagorny Karabakh (environ un million de personnes) et à l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan. Elle anime également un groupe de danses folkloriques, un cercle de jeu d’échecs et des cours de langues. La BADD leur prête gracieusement son local pour des réunions et activités, ainsi que son équivalent à Anvers (AADD). Outre les associations de la pensée d’Atatürk, ce sont aussi le BTKK et la Fédération turque de Belgique qui accordent volontiers leur soutien à la communauté azérie. Il faut également mentionner le soutien du Comité des parents turcs de Molenbeek, dont le président Ferhat Calisan est par ailleurs membre du conseil d’administration du Centre européen des Azéris.

La convergence politique des Azéris et des Turcs s’explique par un dénominateur commun : l’existence de différends avec les Arméniens. Alors que l’Azerbaïdjan s’active pour récupérer les territoires occupés illégalement par les Arméniens, la Turquie essaie de contrer les revendications arméniennes de reconnaissance du génocide du 1915. Et à l’heure où ces revendications se faisaient entendre de plus en plus en Europe, il fallait tout naturellement s’attendre à ce que les associations turques soutiennent activement à leur tour les revendications des Azéris dénonçant l’Arménie.

Le Centre européen des Azéris fait également partie d’une plate-forme de la diaspora azérie européenne, pilotée par le département du gouvernement de Bakou chargé des relations avec les expatriés. Seul le Centre de Fatma Aliyeva a été invité de Belgique au congrès européen de cette plate-forme qui a eu lieu en avril de cette année en Allemagne[8].  Un autre objectif que se donne cette association est de permettre aux femmes azéries d’être plus actives dans la vie sociale et politique. C’est qu’elle veut se distinguer des associations précédentes jugées «trop masculines».
Pour suivre l’actualité de leur pays, les Azéris sont mieux gâtés que les autres turcophones, dans la mesure où ils peuvent capter deux chaînes de télévision par satellite. De plus, lors de la dernière réunion en août 2004 des représentants des diasporas européennes à Oslo, il a été décidé d’œuvrer à la création d’une chaîne de télévision azérie en Europe. Pour le reste, les Azéris forment une communauté assez «branchée» sur internet.

 

Kirghizes, Tatars et Bachkirs

 

Parmi les turcophones présents en Belgique se distingue également la petite mais active communauté kirghize. Les Kirghizes, qui ont commencé à débarquer en Belgique à partir de 1999, proviennent essentiellement du nord de leur pays. L’écrasante majorité des Kirghizes de Belgique est constituée de demandeurs d’asile et seulement une petite minorité vit en séjour stable (statut de réfugié, travailleurs qualifiés, regroupement familial). Malgré le fait qu’ils ne soient que quelques centaines en Belgique, ils s’efforcent de mener au mieux des activités sociales et culturelles. Plusieurs soirées ont notamment été organisées dans le Limbourg. Parallèlement, l’organisation de la diaspora kirghize en Europe «Manas» (kirgisien.narod.ru), basée en Allemagne et représentée en Belgique par Ulan Kalilov, a décidé lors de son congrès à Hanau en mai 2004 de se dynamiser davantage. L’association met l’accent sur des échanges socio-économiques et culturels avec la Kirghizie. Elle fait d’ailleurs partie de l’Assemblée des peuples de Kirghizie, est membre du conseil international de la ville de Hanau et membre du conseil d’administration du site international des Kirghizes du monde (kyrgyz.us). Les Kirghizes n’ont pas encore de télévision par satellite captable en Belgique. Par ailleurs, la communauté kirghize n’a pas encore développé des contacts intenses avec les associations turques bien qu’il existe une communauté kirghize en Turquie (émigration depuis le début du XXe siècle) et beaucoup d’étudiants. Enfin, il convient de mentionner la présence du plus célèbre Kirghize de Belgique: Tchingiz Aïtmatov, un des écrivains contemporains les plus lus (selon l’Unesco) et ambassadeur de son pays à Bruxelles.

Enfin, les turcophones de Belgique ne proviennent pas que d’Asie centrale ou du Caucase mais aussi de la Russie, comme les Tatars et les Bachkirs, deux peuples turcophones très proches l’un de l’autre dont les républiques autonomes se situent entre la Volga et l’Oural et comptent respectivement 6 et 1,5 million d’habitants. Il y a très peu de Tatars et de Bachkirs en Belgique. Il existe une importante communauté en Allemagne dont un centre culturel à Berlin (créé en 1999 et soutenu par l’Institut de la turcologie de l’Université de Berlin). En Belgique, cette nouvelle communauté a commencé à se former à partir des années 1999-2000 ; il s’agit surtout de demandeurs d’asile provenant de Russie, mais aussi des pays de l’Asie centrale où ils ont vécu durant l’époque soviétique. Ils n’ont pas encore d’association en Belgique, mais ils ont l’intention de jeter les fondements d’une plate-forme européenne dans un avenir proche. Actuellement, les Tatars et les Bachkirs du Benelux «s’organisent» via des forums sur internet (bashkortostan.net/tugan). Malgré le fait qu’ils aient en général des liens culturels et économiques très développés avec la Turquie, où une importante communauté tatare s’est formée à partir des migrations depuis la fin du XIXe siècle, la jeune communauté tatare et bachkire n’a pas encore développé des liens étroits avec la communauté turque de Belgique.

Pour terminer, il convient également de noter la présence en Belgique d’autres turcophones comme des Ouzbeks, des Kazakhs, des Koumyks du Daguestan, des Karatchaïs du Caucase du Nord et des Gagaouzes de Moldavie (seul peuple turcophone de confession chrétienne orthodoxe).



[1] Panturquisme ou pantouranisme : mouvement politique nationaliste tendant à réunir tous les peuples turcs dans le cadre d’un même État ou dans une union autour de la Turquie.
[2] Les réseaux d’écoles et d’universités, l’œuvre des fondations privées appartenant aux confréries turques, parmi lesquels se distinguent les Nurcular de Fethullah Gülen, font d’ailleurs l’objet de nombreuses controverses en Turquie, en Russie et dans des républiques turcophones.
[3] Voir le soutien accordé par les Turcs, essentiellement proches de Milli Görüş, de la Fédération turque de Belgique ou des confréries, aux communautés non turcophones comme les Afghans, les Bosniaques, les Kosovars ou les Tchétchènes.
[4] La cause ouïgoure jouit du soutien important du Parti radical transnational grâce auquel en octobre 2001 a été organisée au Parlement européen à Bruxelles une conférence intitulée "La situation au Turkestan Oriental après 50 ans d'occupation communiste chinoise" ainsi que le 3-ème Congrès mondial des Ouïgours. La préparation de cette conférence a subi un sérieux revers quand on apprit que de nombreux délégués ouïgours ne reçurent pas de visas pour motif de sécurité dans l’atmosphère de l’après 11 septembre. Député européen et secrétaire du Parti radical, Olivier Dupuis avait dénoncé «des forces de l’ombre» et «de petits Quiesling en service permanent au sein de notre Parlement » qui ensemble avec «l’Ambassade de la République populaire de Chine s’emploie depuis des semaines (…) à torpiller une conférence qui risquerait de mettre en lumière une politique d’occupation, d’humiliation et de destruction tout aussi grave mais bien moins connue que celle mise en oeuvre au Tibet».
[5] Les Ouïgours, comme les autres turcophones, fêtent aussi le Nevrouz, le Nouvel An du 21 mars ou la Fête de Printemps qui est une fête nationale dans toutes les républiques turcophones, mais aussi une fête adoptée depuis peu par la Turquie, où cette tradition était depuis longtemps vue d’un mauvais œil car observée par les minorités kurde et alévie. 
[6] En juin 1998 cette association a démis Gürçam de son titre de président, puis s’est dissoute (Moniteur.be 24.12.1998). Néanmoins, on lit sur le site diaspora.az appartenant au Département du gouvernement azéri chargé des communautés expatriées qu’en 1999, sur base de ce Centre, a été créé une «Association d’amitié Belgo-Azérie» à Saint-Josse. L’association n’a pas fonctionné longtemps.
[8] Alors que sur le site de ce département ce sont encore la Maison d’Azerbaïdjan et l’Association d’amitié Belgo-Azérie qui figurent comme interlocuteurs en Belgique.

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Turkstaligen: een grote familie?

door Murat Daoudov

Feb 2005 Uitpers.be & Ymyt.com


Oeigoeren, Azeri's, Kirgiezen, Tataren of Basjkieren, al deze minderheden die zich in België gevestigd hebben, delen een Turkstalig dialect, zonder dat ze van Turkije afkomstig zijn. Hoe organiseren ze zich en wat zijn hun banden met de Turkse gemeenschap?

De ineenstorting van de Sovjet-Unie en de opkomst van een Turkstalige regio die zich uitstrekt van Oost-Europa tot China, heeft de belangstelling gewekt van Turkije. Velen zien in deze verandering een historische gelegenheid om panturkse(1) ideeën te ontwikkelen. Tijdens de Sovjet-heerschappij over Centraal-Azië en de Kaukasus was dit niet mogelijk.

In de jaren 1990 heeft Turkije veel moeite gedaan om de banden met de "kleine broertjes"aan te halen. Door topoverleg tussen staatshoofden van Turkstalige landen, Turkse televisie-uitzendingen over de regio's en economische investeringen om Turkstalige colleges en universiteiten(2) op te richten, zoeken de zusterstaten toenadering. Bovendien zorgt een programma van Ankara ervoor dat tienduizenden jonge Turkstaligen met een staatsbeurs in Turkije kunnen studeren. Dit programma wil naast ontwikkelingshulp een Turks sprekende elite vormen om de in het Russisch opgeleide groep te vervangen. Gezien de historische banden, wordt Turkije door het Westen gezien als een stabiliserende factor voor de godsdienst. Het Westen verwacht dat ze het Turks model, gebaseerd op scheiding van kerk en staat en vrije markteconomie overnemen.

De uitwisselingen hebben zeker effect gehad op de Turkstalige diaspora in Europa, die met veel belangstelling en sympathie de nieuwe Turkstalige immigranten verwelkomd heeft. Door de toenemende komst van migranten en asielzoekers uit het Oosten hebben de Turken in Europa hun "bloedbroeders", waarover ze in de Turkse media al zoveel gehoord hadden, ontdekt. Natuurlijk heeft dit fenomeen meer belangstelling gewekt bij Turken die door hun politieke of spirituele overtuiging, gevoeliger zijn dan anderen. Zo heeft de Turkse Federatie van België (nationalistisch en pantouranistisch) zich onder de Turkse fracties geprofileerd met de steun aan de nieuwe Turken. De door bloed en taal verwante gemeenschappen kwamen vanaf 1998 in België toe .

De Turkse gemeenschap, bekend om haar liefdadigheid, heeft nieuwe Turkstaligen geholpen in de overgangsperiode uit ballingschap. Vaak hebben de nieuwe migranten in de Turkse wijken werk en onderdak gevonden voor een redelijke prijs. De Turkse gemeenschap heeft ook haar grote ervaring met het verenigingswerk geleend om de nieuwkomers te helpen zich te organiseren in verenigingen en alzo subsidies te krijgen. Anderzijds zijn het voor de Turken vaak ideologische overwegingen (panturkisme, religieuze broederschap, gemeenschappelijke geopolitieke tegenstanders...) die de drijvende kracht vormen van het onthaal.

De Oeigoeren

De eerste Turkstaligen die zich lieten opmerken door de Belgische publieke opinie en de Turkse gemeenschap, zijn de Oeigoeren. Ze komen hoofdzakelijk van Kazakhstan en Kirgizstan.

De Oeigoeren zijn een volk afkomstig van Oost-Turkestan. Vandaag is dit de autonome regio Xinjiang in de Volksrepubliek China, bezet sinds 1949. De Oeigoeren zijn één van de belangrijkste Turkstalige volkeren zonder staat. In China zijn ze met 7 à 10 miljoen. China heeft veel inspanningen gedaan om dit volk te bedwingen, bijvoorbeeld door de massieve immigratiepolitiek van Han-Chinezen in de regio. Vandaag telt het Oeigoerse volk minder dan 50% van de bewoners van de autonome regio. Tengevolge van de Chinese repressie, die begon in de jaren 1950, zijn veel Oeigoeren eerst gevlucht naar Kazakhstan, Kirgizstan en Oezbekistan (waar ze vandaag met ongeveer 500.000 zijn), daarna naar Turkije (met 15.000 Oeigoeren). Vandaag komt de tweede migratiegolf in een halve eeuw tijd naar Europa.

De radicale verstrenging van het Belgische asielbeleid van januari 2001 leidde tot de gemediatiseerde en controversiële uitwijzing van een dertigtal asielzoekers per vliegtuig naar Kazakhstan, onder wie verschillende Oeigoeren. Deze actie had een onverwacht neveneffect: de maatschappelijke belangstelling voor de situatie van de Oeigoeren en de mensenrechten in Centraal-Azië. Een colloquium georganiseerd in de Senaat in januari 2001 handelde specifiek over de situatie van deze gemeenschap in ballingschap. Bovendien heeft een reeks artikelen in de pers ook de aandacht op haar gevestigd. In dezelfde periode vond een pijnlijk voorval plaats, de zelfmoord van een jonge Oeigoer in Dessel. Hij was erg aangegrepen door de sfeer en angst voor uitwijzing door de beelden van gepantserde voertuigen in de media. Het was een echte shock voor de gemeenschap, gemobiliseerd door de pers, de maatschappij en een afgevaardigde van de Turkse gemeenschap. Allen betuigden hun solidariteit.

Deze situatie motiveerde de Oeigoeren in België om zich te organiseren. Zo werden in 2001 de eerste Oeigoerse verenigingen gevormd ("Organisatie van de Oeigoerse jeugd" in Anderlecht) en in 2002 ("Oeigoers cultureel centrum" in Schaarbeek en "Oorsprong" in Verviers). Dit proces, na enkele tegenslagen en herschikkingen, mondt uit in de oprichting van het Oeigoers cultureel centrum "Ymyt" in mei 2003 in Antwerpen. Aan het hoofd staat Tursun Machpirov. Ymyt wordt gesteund door het lokale centrum De Wijk. De Oeigoerse gemeenschap in België, waarvan de eersten in 1998-1999 toekwamen, telt vandaag ongeveer 500 mensen. De ene helft is afkomstig van Kazakhstan, de andere helft van Kirgistan, maar ook van Oezbekistan en in beperkte mate van China. De Oeigoeren wonen hoofdzakelijk in Antwerpen en Brussel; ze zijn bijna allemaal asielzoeker; zelden worden ze erkend. Verpletterd tussen de supermacht China en autoritaire regimes in Centraal-Azië, voelen de Oeigoeren zich slachtoffer van de realpolitik(3). Ondanks alles waken ze erover hun cultuur te behouden, zoals bijvoorbeeld via het centrum Ymyt. Dit centrum is een onderdeel van het internationale Kurultaï (congres) van de Oeigoeren, gevestigd in München, opgericht in april 2004 na de fusie van het nationaal congres van Turkestan en het World Youth Oeigoer Congres.

Bij hun eerste kennismaking met België kregen de Oeigoeren veel steun van Turken, in het bijzonder van de Turkse federatie van België (begeleiding bij het zoeken naar een woning, werk, folkloristische manifestaties, sensibiliseringscampagnes bij de Turkse gemeenschap, steun van een Turkse advocaat voor Oeigoeren die dreigden uitgewezen te worden). Nu de gemeenschap voldoende ervaring heeft met verenigingswerk, werkt ze met de steun van openbare instellingen (De Wijk). De contacten met Turkse verenigingen zijn minder frequent. Anderzijds gaan de Oeigoeren bidden in Turkse moskeeën en vieren ze samen traditionele religieuze feesten(4). Naast de vele internetsites (ymyt.com) volgen de Oeigoeren op mediagebied de Kazakhse televisie per satelliet. Er wordt een informatieblad gemaakt in München in de Oeigoerse taal (Arabisch schrift), in het Engels, het Turks en binnenkort in het Russisch.

De Azeri's

Een andere belangrijke Turkstalige gemeenschap, die van zich laat spreken in de lokale Turkse pers, zijn de Azeri's. Haar diaspora kent meer dan 2 miljoen mensen in de ex-Sovjet-Unie, voornamelijk in Rusland en Oekraïne en meer en meer in Europa. De Azeri-gemeenschap in België is in twee verdeeld: Azeri's van Turkije (van de provincie Igdir), als Turkse arbeiders in de jaren 1960-70 naar ons land gekomen, en Azeri's van Azerbeidzjan. De gemeenschap van Azeri's van Azerbeidzjan heeft zich gevormd sedert 1989-99. Vandaag zijn ze met 200 (tegenover 2.000 Azeri's van het Turkse Igdir). Slechts een tiental families heeft een definitief verblijf gekregen in ons land (statuut van vluchteling, regularisatie). De overgrote meerderheid zijn asielzoekers maar ook 10 à 15% illegalen (uitgeprocedeerde asielzoekers of "toeristen"). Er is ook een klein aantal studenten of gekwalificeerde arbeiders met contract. De meeste Azeri's wonen in Brussel of Antwerpen.

Wat betreft het verenigingsleven, zijn het in de eerste plaats de Turkse Azeri's die in 1993 de eerste vereniging oprichtten (waaronder Ferhat Calisan, vandaag voorzitter van het Comité van Turkse Ouders in Molenbeek). In 1998 volgt het "Cultureel en Informatie Centrum van Azerbeidzjan". Het wordt geleid door Bülent Gürçam, een Turks zakenman met Azeri-roots. Hij was journalist voor de Turkse kranten Tercüman en Hürriyet en chauffeur van de ambassade van Azerbeidzjan. Tegelijkertijd richt Gürçam in 1999 het "Belgisch-Azerische Verbond Shur" op in Ukkel en in 2000 de vereniging "Het Huis van Azerbeidzjan" in Molenbeek met asielzoekers uit Azerbeidzjan. Dat laatste organiseerde een fototentoonstelling op het Muntplein in Brussel (februari 2003). De tentoonstelling herdacht de elfde verjaardag van het bloedbad in het dorpje Khodjali waar honderden burgers afgeslacht werden door de Armeense guerrilla in het conflict over Nagorno-Karabach (een vooral door Armeniërs bewoonde enclave in Azerbeidzjan). De manifestatie kende een grote belangstelling vanwege de Turkse gemeenschap.

Begin 2003 kent de organisatie "Odlar Yurdu" (Land van Vuur) een kort en bewogen bestaan. Ze werd gesticht door Adalet Guliyev, een genaturaliseerde vluchteling, en Lokman Uzel, een Turk van Nederlandse afkomst. De organisatie voerde een aantal protestacties tegen de Armeense autoriteiten die ze beschuldigde van medewerking aan de afslachting van Azeri's in Nagorno-Karabach. Een betoging aan de ambassade van Armenië kreeg de steun van de BTKK (Coördinatieraad van de Turken in België). Na een moordaanslag, door Turkse en Azeri websites toegeschreven aan Armeniërs, maakt Guliyev een eind aan zijn politieke carrière.

Vandaag is de meerderheid van de Azeri's georganiseerd in het "Europees Centrum van de Azeri's", begin 2004 gesticht door Fatma Aliyeva en haar echtgenoot, Bahri Yildirim, Turks zakenman uit Nederland. De organisatie telt ongeveer 150 leden, waarvan de overgrote meerderheid Azeri's van Azerbeidzjan zijn, maar ook enkele van Turkije. Het centrum heeft afgelopen februari een manifestatie georganiseerd aan het rondpunt Schuman in Brussel om het bloedbad van Khodjali te herdenken. De actie werd gesteund door de BADD (vereniging in Brussel gebaseerd op het gedachtengoed van Atatürk) en de BTKK. Naast sociale en culturele doelstellingen wil de vereniging de publieke opinie sensibiliseren voor het lot van de Azerische vluchtelingen van Nagorno-Karabach (ongeveer één miljoen personen) en de territoriale integriteit van Azerbeidzjan. Ze leidt ook een groep van folkloristische dansers, een schaakcircuit en taalcursussen. De BADD leent ze haar lokaal voor vergaderingen en activiteiten, net zoals haar tegenhanger in Antwerpen (AADD). Ook de BTKK en de Turkse federatie van België bieden graag hulp aan de Azerische gemeenschap. Ook het Comité van Turkse Ouders van Molenbeek moet vermeld worden; haar voorzitter, Ferhat Calisan is overigens lid van de administratieve raad van het Europees Centrum van de Azeri's.

Het politiek samengaan van Azeri's en Turken is te verklaren door een gemeenschappelijk kenmerk: geschillen met de Armeniërs. Terwijl Azerbeidzjan druk in de weer is om bezette gebieden te heroveren op de Armeniërs, verzet Turkije zich tegen de Armeense eisen om de volkerenmoord van 1915 te erkennen. Men moet afwachten hoe Turkse verenigingen actief de eisen steunen van Azeri's die zich kanten tegen Armenië.

Het Europees centrum van de Azeri's is onderdeel van een platform van de Azerische diaspora in Europa, die bestuurd wordt door de regering van Bakoe, belast met de contacten met bannelingen. Enkel het Centrum van Fatma Aliyeva werd door de Belgische overheid uitgenodigd deel te nemen aan het Europees congres van dit platform, dat plaatsvond in Duitsland in april 2004. Een andere doelstelling van de vereniging, is de actievere deelname van Azerische vrouwen aan het sociale en culturele leven. Ze wil zich afzetten tegen verenigingen die voorheen als té "mannelijk" werden aanzien.

Om de gebeurtenissen in hun land te volgen, worden de Azeri's meer verwend dan de andere Turkstaligen, gezien ze twee televisiezenders kunnen ontvangen per satelliet. Daarnaast vormen de Azeri's een hechte gemeenschap via internet.

Kirgiezen, Tataren en Basjkieren

Onder de Turkstaligen in België onderscheidt zich ook de kleine maar actieve Kirgiese gemeenschap. De Kirgiezen die vanaf 1999 naar België kwamen, komen voornamelijk uit het noorden van hun land. De overgrote meerderheid van Kirgiezen in België is asielzoeker en slechts een kleine minderheid heeft een stabiel statuut (statuut van vluchteling, gekwalificeerde werknemers, familiehereniging). Ondanks het feit dat ze maar met enkele honderden zijn in België, doen ze hun best om sociale en culturele activiteiten te organiseren. In Limburg zijn verschillende avonden georganiseerd. De organisatie van de Kirgiese diaspora in Europa, "Manas" (kirgisien.narod.ru), gevestigd in Duitsland, in België vertegenwoordigd door Ulan Kalilov, besliste op een congres in mei 2004 zich dynamischer op te stellen. De vereniging legt de nadruk op socio-economische en culturele uitwisseling met Kirgistan. Ze is lid van de Raad van het volk van Kirgistan, lid van de internationale raad van de stad Hanau en van administratieve raad van de internationale Kirgiese site (kyrgyz.us). De Kirgiezen hebben nog geen satellietontvangst in België. De Kyrgyzse gemeenschap heeft nog geen intense contacten opgebouwd met Turkse verenigingen, hoewel er in Turkije een Kirgiese gemeenschap is (emigratie sinds het begin van de XXe eeuw). De meest gekende Kirgies, Tchingiz Aïtmatov, één van de meest gelezen hedendaagse schrijvers (volgens Unesco), is ambassadeur voor zijn land in Brussel.

Tot slot komen de Turkstaligen in België niet alleen van Azië en de Kaukasus, maar ook van Rusland, zoals de Tataren en Basjkieren. Deze twee Turkstalige volkeren zijn nauw aan elkaar verwant. Hun autonome republieken bevinden zich tussen de Volga en de Oeral en tellen respectievelijk 6 en 1.5 miljoen inwoners. In België zijn er heel weinig Tataren en Basjkieren. In Duitsland is er een belangrijke gemeenschap met een cultureel centrum in Berlijn, dat gesticht is in 1999 en ondersteund wordt door het Turkologisch Instituut van de Universiteit. In België begon deze nieuwe gemeenschap zich te vormen in 1999-2000. Het gaat vooral om asielzoekers uit Rusland, maar ook Centraal-Aziatische landen, waar ze tijdens de Sovjet periode woonden. In België hebben ze nog geen vereniging, maar er zijn plannen voor een Europees platform in de nabije toekomst. Nu "organiseren" de Tataren en Basjkieren van de Benelux zich via internet forums (bashkortostan.net/tugan). Ondanks het feit dat er culturele en economische banden zijn met Turkije, waar een grote Tataarse gemeenschap leeft sinds het einde van de 19e eeuw, zijn er nog geen nauwe banden met de Turkse gemeenschap in België.

Om af te sluiten, is het gepast om de aanwezigheid van andere Turkstaligen in België te vernoemen, zoals de Oezbeken, de Kazakhen, de Koemyks van Dagestan, de Karatsjajs van het noorden van de Kaukasus en de Gagaoezïërs van Moldavië (enig Turkstalig volk met een christelijk orthodoxe religie).

(Uitpers, nr. 61, 6de jg., februari 2005)

Murat Daoudov is medewerker van het Centrum voor gelijke kansen en racismebestrijding en het observatorium voor migraties.

Noten:

(1) Panturkisme of pantouranisme: nationalistische politieke beweging die ernaar streeft om alle turkse volkeren te verenigen in één staat of unie rond Turkije.

(2) De netwerken van scholen en universiteiten , het werk van privé verenigingen van Turkse broederschappen, veroorzaken talloze controverses in Turkije, Rusland en Turkstalige republieken.

(3) De Oeigoerse zaak krijgt steun van de transnationale Radicale Partij. In oktober 2001 organiseerde deze partij een congres in het Europees parlement, getiteld "De situatie van Oost-Turkestan na 50 jaar Chinese communistische bezetting" en het derde Oeigoers Wereldcongres. De voorbereiding van deze conferentie kende een serieuze tegenslag omdat vele Oeigoerse afgevaardigden geen visum kregen omwille van veiligheidsredenen na 11 september. Europees afgevaardigde en secretaris van de Tadicale Partij, Olivier Dupuis, hekelde "de machten van de schaduw" en "kleine Quieslings in permanente dienst van ons parlement", die samen met de "Ambassade van de Volksrepubliek China al weken op voorhand (...) een conferentie wil doen mislukken, omdat ze riskeerde een politiek van bezetting, vernedering en vernietiging aan het licht te brengen".

(4) Zoals andere Turkstaligen, vieren de Oeigoeren ook Nevroz, het Nieuwjaar van 21 maart of het Lentefeest. Dit is een nationaal feest in alle Turkstalige republieken, door Turkije slechts sinds kort overgenomen. In Turkije wordt deze traditie scheef bekeken omdat ze wordt nageleefd door de Koerdische minderheid.

http://www.uitpers.be/artikel_view.php?id=961

http://ymyt.com/nl/2/29_1.shtml Vertaald door Dirk Verghote.

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Turcs et turcophones en Belgique à l’aube du XXie siècle

Oct 2004 Politique: Voyage au Türkbeekistan
Par Mehmet Koksal

Cet article est paru dans le numéro de Politique daté d'octobre 2004.

Pas un jour se passe sans une belle histoire, nourrie d’un grand souffle originaire des vents violents chargés d’histoire de l’Asie mineure, en plein cœur du Türkbeekistan. Cette longue allée commerçante de la chaussée de Haecht allant de Saint-Josse à Schaerbeek en plein centre de Bruxelles est le théâtre public des campagnes électorales au loukoum, des rumeurs de mariage intervillageoises, des alliances et divorces de la communauté turque. Dent en or qui brille, chemise ouverte et moustache de pasha, l’un des seniors envoie une volée ottomane sur la nuque fraîche du serveur de thé. « Allez, tu as du bol, j’ai entendu qu’on allait te marier ! ». Qui aime bien, châtie bien et fort...

La vie de la diaspora turque en Belgique est à l’opposé de celle des ancêtres. De villageois, ils sont devenus des citadins vivant dans la capitale de l’Europe. Ils étaient de petits paysans travaillant la terre et élevant des bêtes, ils sont devenus des commerçants ou salariés, purs produits des années quatre-vingt de la crise économique. Ils vivaient dans des fermettes entourées de grands espaces presque verts, ils vivent maintenant dans des appartements bruxellois entourés d’autres immeubles semblables où il a fallu souvent installer la première douche. D’un niveau d’éducation se limitant souvent à l’école primaire, ils gèrent actuellement un commerce et un ménage en terre étrangère. Après 40 ans de présence en Belgique, les Turcs se remettent à peine du changement radical de mode de vie pour s’intéresser à la citoyenneté. Qui aime bien, s’installe bien...

Et pourtant, tout est histoire de perception. Lorsqu’on demande à d’autres minorités ethniques la vision qu’ils ont des Turcs, la réponse est constante. L’illusion d’optique présente la communauté turque comme un bloc monolithique, organisée et capable d’agir en groupe de pression ethnique auprès des autorités belges. Soit exactement la vision que développe de plus en plus la même communauté turque à propos des autres minorités installées en Belgique tout en pressant ses membres d’apporter un soutien indéfectible afin de créer ce « vrai lobby » tant désiré. L’obsession du lobby ancrée dans les esprits tente de créer l’homogénéité à partir d’une si forte diversification.

En effet, regardons à travers une analyse croisée la composition de la communauté turque ou turcophone en Belgique. Ainsi, sur l’axe ethnique, on constate une forte diversification des origines (turque, kurde, arménienne, assyrienne,...). Sur l’axe religieux, l’apparente domination islamique en nombre cache souvent les conflits interclaniques et les luttes d’influence entre les différentes obédiences religieuses (tendances étatique, milli görüs, nurcu, suleymanli...). Enfin l’analyse politique (nationalistes, communistes, islamistes, progressistes, libéraux) offre une lecture spécifique pour décoder les activités organisées. Bien entendu, le tout se passe dans ce qu’on appelle l’infrapolitique, cette strate d’activités non visible du grand public et pourtant si forte en tension. ÊEtre d’origine turque en Belgique signifie donc un positionnement sur cette grille hachurée qui en l’espace de quelques temps vous transforme afin de vous préparer à affronter la strate visible, la seule vraie qui compte : l’autre dimension communautaire belge parsemée de conflits linguistiques (francophones-néerlandophones), économiques (wallons-flamands), régionaux (Bruxelles vs Wallonie vs Flandre et vice versa). Qui aime bien, s’amuse bien...

En ouverture de ce thème, Pierre-Yves Lambert et Pierre Vanrie tracent les fondements historiques de la Turquie et en décryptent les diverses composantes ethniques et religieuses. Dans la foulée, Murat Daoudov pose son regard sur les différents groupes de population minoritaires vivant en Turquie et en Belgique, pour en faire ressortir leurs rapports avec la communauté turque. Amertume, colère, haine, reconnaissance, le temps a charrié un lot de sentiments souvent âpres entre trois des grandes communautés vivant sur le territoire de l’ancien empire ottoman ; turque, kurde et arménienne. Nous avons tenté une rencontre entre des représentants de ces groupes en Belgique. Une entreprise ambitieuse qui a finalement pu se réaliser...à distance. Pierre-Yves Lambert s’emploie ensuite à présenter les principales étapes de l’ascension politique de la communauté turque de Belgique. Une rapide et glorieuse progression, polychrome sur le plan idéologique et suivie de près par les autorités turques. De leur côté, Dirk Jabobs, Eric Cillessen et Mehmet Koksal tentent de recomposer le réseau associatif turc bruxellois en mettant en évidence les relations politiques à travers une minutieuse recherche.

Dispersée sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne, la diaspora turque est traversée par des courants religieux multiples. Meryem Kanmaz en décrit les contours et différencie l’islam turc de l’islam européen naissant. Toujours sur le registre religieux, Mehmet Koksal a poussé les portes du nouvel Exécutif des musulmans de Belgique en formation. Pour y découvrir des rapports tendus entre certains représentants musulmans et les autorités belges ainsi qu’une omniprésence d’Ankara dans les négociations

Enfin, deux rencontres terminent ce voyage. L’une avec Hüsniye Kardas, styliste, l’autre avec Rabia Kaçar, réalisatrice de documentaires, qui nous content leur enfance et leur parcours d’émancipation à partir de leur communauté d’origine.

Le thème a été coordonné par Mehmet Koksal.

http://politique.eu.org/archives/2004/10/7.html

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La rentrée avec ou sans foulard?

LLB 08.09.2003
Spiritualités


Faut-il permettre le port du voile au nom du droit à la différence? Ou l'interdire pour préserver la neutralité de l'enseignement? Petit tour non exhaustif des arguments en jeu.


Belga


ALAIN FINKIELKRAUT philosophe, écrivain français

(...) L'école est aussi un espace sacré. Devant la culture on s'incline, on baisse la tête, et cela je crois qu'on peut le demander à tous. Or ce sacré de l'école, le social ne le supporte pas. Le social n'accepte rien en dehors de sa loi. Puisque, dit-on, chacun s'habille comme il le veut dans la société, chacun doit pouvoir le faire dans l'école - à part les professeurs, bien entendu, eux seuls étant astreints à une obligation de neutralité.

Je ne pense pas qu'il en soit ainsi. L'école a ses règles, l'école a ses lois, et l'Islam pose un problème spécifique dans la mesure où on a le sentiment que certains de ses représentants le perçoivent, de plus en plus, comme une communauté qui doit d'abord affirmer ses revendications et qui ne reconnaîtra sa francité que le jour où celles-ci seront satisfaites. (...)

L'intégration passe par la clarté, la fixation d'un cadre. Tant qu'il n'y a pas de cadre, certains musulmans pourront continuer à se sentir extérieurs à la France.

ETIENNE BALIBAR, SAÏD BOUAMANA,... Extrait de la lettre ouverte «Oui, à la laïcité, non aux lois d'exception»

(...) Nous refusons aussi la focalisation sur le foulard islamique parce qu'elle s'inscrit dans un mouvement d'ensemble qu'il est urgent d'enrayer: la colonisation de tous les espaces de la vie sociale par des logiques punitives. Après la fraude dans le métro, le stationnement dans les halls d'immeuble et l'outrage au drapeau ou à l'hymne national, c'est l'outrage à enseignant qui est devenu passible de prison. L'exclusion des élèves voilées s'inscrit dans cette surenchère punitive, au détriment des interrogations et des solutions politiques et pédagogiques.

Elle ne peut donc être ressentie par l'ensemble des élèves que comme une mesure brutale et discriminatoire, venant redoubler toutes les injustices que subissent déjà, dans leurs quartiers, les jeunes des milieux populaires, notamment ceux qui sont issus de l'immigration post-coloniale. Le minimum d'estime réciproque requis entre professeurs et élèves pour que la relation pédagogique ait lieu risque d'être gravement compromis.

Patrick TRAUBE, psychologue, écrivain

La chose est connue: la plus efficace des publicités pour un produit douteux (film, livre,...), c'est sa censure. Précepte éprouvé: pour rendre un comportement attractif pour un adolescent, interdisez-le! Dès lors, si l'effet escompté est de décourager le port du foulard (ou de tout autre «marqueur» culturel), l'effet prévisible sera son exact opposé. En prime, on aura offert le pain béni aux extrémistes, experts dans l'art de récupérer le sentiment d'incompréhension vécu par les jeunes allochtones.

Plus grave. Une inconséquence sur le plan des valeurs. «Il faut privilégier ce qui nous ressemble», nous dit-on. Intention louable, sans doute. Mais à quel prix? Au prix du déni des différences qui nous identifient et nous permettent d'exister aux yeux des autres? Entre «rassembler» et «ressembler», il n'y a que la distance d'une lettre. Sous le blanc manteau de l'argumentaire «rassembleur», j'entrevois l'insigne noir du Grand Uniformisateur. Nier les différences, c'est dénier le réel.

Un directeur d'établissement en Communauté française

J'entends les arguments de ceux qui plaident en faveur du port du foulard. Il s'agit notamment de psychologues qui se placent dans une perspective individuelle: ils se soucient d'abord de la personne de l'élève.

C'est un souci que partagent les enseignants, mais si l'école prend en compte - et comment! - cette préoccupation, elle doit aussi s'interroger dans une perspective sociétale, celle de jeunes qui doivent s'intégrer, celle d'une société qui définit les valeurs à partager... et les autres. En tant qu'institution, l'école officielle doit quelquefois dépasser le développement personnel de quelques élèves pour contribuer à un de ses objectifs plus vaste et d'ordre général: construire la société dans laquelle nous voulons vivre. Et quelle sera-t-elle? Une juxtaposition d'individus avec des droits différents (dont celui de donner moins de droits à une femme?) ou une communauté qui partage le plus grand dénominateur commun? Une juxtaposition de ghettos ou l'union de personnes avec des mêmes obligations?

MURAT DAOUDOV Membre du Conseil des Bruxellois d'origine étrangère (CBOE)

Des deux côtés, c'est la peur. La peur des concessions. De côté des musulmans, la peur de voir venir d'autres mesures discriminatoires, de côté des autorités l'inquiétude, même si camouflée, de céder devant «la montée de l'intégrisme». Après le foulard, quelles seront les mesures ou exigences suivantes?

MALEK BOUTIH, ancien président de SOS Racisme

L'école ne doit pas être le champ de bataille des influences religieuses: le foulard ne doit pas entrer à l'école. Ca ne peut plus être discutable et contestable. Une jeune fille peut porter le foulard en France, la Constitution la protège dans son droit de porter le foulard. Mais certains lieux sont des lieux communs, où la croyance des uns ne peut pas déterminer la croyance des autres.

MICHEL STASZEWSKI Professeur dans l'enseignement secondaire

Prétendre lutter contre l'obligation (non démontrée dans la plupart des cas) qui serait faite aux jeunes filles musulmanes de porter un foulard en leur interdisant de le faire m'apparaît comme éminemment contre-productif: on prétend soigner le mal par le mal; on répond à une contrainte supposée par une autre contrainte. Et si l'objectif est, par ce moyen, d'empêcher un repli identitaire, je suis persuadé que c'est l'effet inverse qui est induit. En plus des élèves directement concernées, ce sentiment de non-reconnaissance, de non-acceptation de certaines de leurs particularités culturelles touche bien évidemment leurs familles et, au-delà, une grande partie de leur communauté culturelle.

SÉBASTIEN VAN DROOGHENBROECK Chargé de cours aux Facultés universitaires Saint-Louis

Le fait est qu'il y a une absence de cadre en Communauté française: il n'existe pas de décret qui interdise formellement le port du foulard, mais pas plus qu'il n'en existe qui interdise... de l'interdire. Si l'on se réfère aux normes supérieures, la Constitution belge comme la convention des droits de l'homme consacrent la liberté d'expression, religieuse notamment, mais pas de manière absolue. Dans un contexte particulier, comme l'école, la liberté de croyance quand elle se transforme en prosélytisme peut ainsi porter atteinte à la liberté de conviction d'autres. Il me semble très difficile aujourd'hui de trancher dans un sens ou dans l'autre, de manière abstraite.

La Cour européenne des droits de l'homme étudie actuellement le cas d'étudiantes turques interdites de porter le foulard à l'université: son jugement sera intéressant. Mais, en attendant, le cas par cas me semble le plus sage.

© La Libre Belgique 2003



http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=132031

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Le voile agitateur?

SOCIÉTÉ
LLB 14.06.2003

Fantasmes, peurs et concessions, en Belgique, en France, en Turquie ou en Russie, le voile s'impose en «agitateur» et en catalyseur des discussions sur l'avenir des musulmans en Europe


MURAT DAOUDOV, membre du Conseil des Bruxellois d'origine étrangère (CBOE)

Le voile occupe ces derniers mois l'actualité de plusieurs pays, devenant le sujet de la controverse publique. Dans les écoles, la fonction publique ou sur les cartes d'identité il provoque des débats passionnés.

En Belgique, son irruption dans l'actualité avec la manifestation devant l'école Athénée Bruxelles II à Laeken en fera sans doute un des dossiers-test pour le nouveau gouvernement. De nombreuses filles musulmanes voilées et non se sont mobilisées pour protester contre l'interdiction du foulard jugée comme un signe de l'intolérance à leurs valeurs et la liberté de conscience. Loin d'être un élément de prosélytisme, le voile est pour elles un symbole de liberté et elles réclament le droit de vivre leurs particularités dans une société respectueuse de sa diversité.

L'initiative d'interdire le foulard dans les écoles a inévitablement blessé les susceptibilités de nombreux musulmans. Au-delà d'une simple question qui relève de l'ordre intérieur scolaire, elle s'inscrit pour eux dans la politique qui les vise et cherche à limiter leurs acquis sur fond de la montée de l'islamophobie. Et dans l'absence de véritable dialogue, les questions comme celle du voile deviennent vite des champs d'affrontement pour des camps opposés.

Des deux côtés, c'est la peur. La peur des concessions. De côté des musulmans, la peur de voir venir d'autres mesures discriminatoires, de côté des autorités l'inquiétude, même si camouflée, de céder devant «la montée de l'intégrisme». Après le foulard, quelles seront les mesures ou exigences suivantes? Le foulard pourrait-il devenir un casse-tête futur pour le gouvernement et la manifestation à Laeken en est-elle un signe précurseur? Il semble bien que oui.

Mais la Belgique n'est pas seule à affronter ce dossier épineux. Le voile a constitué une épreuve importante devant le gouvernement turc du parti AKP («islamistes modérés» ou «conservateurs démocrates» selon les uns ou les autres). La question du voile provoque des tensions et le parti au pouvoir a dû vivre une véritable crise en avril dernier, quand le président de la République, le chef de l'état-major et des hauts bureaucrates ont boycotté la réception officielle au parlement à l'occasion de la fête nationale. En cause: les épouses voilées des responsables du parti au pouvoir. Au yeux des défenseurs de la laïcité stricte, le nouveau gouvernement veut «détourner la Turquie de la voie de modernisation et l'éloigner du monde civilisé» en banalisant le voile dans l'administration. «Le sommet de l'Etat s'est heurté au foulard» a ironisé un journaliste. Le président du parlement turc (membre de l'AKP), au centre des critiques émanant de la presse pro «kémaliste», s'est vu attribuer par les médias la phrase «le vrai danger est le décolleté (et pas le voile)». Même s'il l'a démentie, cette phrase illustre bien à quel point l'habillement est devenu le symbole des camps opposés en Turquie.

Là aussi, les adversaires se défendaient avec ardeur. Alors que les uns voyaient dans l'irruption du voile une tentative de remise en cause du caractère laïc de l'Etat, les autres arguaient que la Turquie de XXIe siècle devait dépasser les vieux fantasmes de la «menace intégriste». Remarquablement, les camps se référaient tous les deux à l'Occident: quand les «conservateurs musulmans» se référaient aux Etats-Unis (le Premier ministre Erdogan n'avait-il pas dû y envoyer ses filles à l'université, car voilées, elles ne pouvaient pas étudier dans leur pays?), les fervents défenseurs de laïcité s'inspiraient de la France où la volonté d'interdire le port du voile ravivait aussi des débats passionnés.

Dans l'Hexagone, le «problème du foulard» a vu officiellement le jour voici près de quatorze ans, mais s'est reposé avec une certaine acuité devant le nouveau gouvernement. Le Premier ministre Raffarin venait d'achever un chantier important, celui de création du Conseil français du culte musulman (CFCM). Naissant dans un contexte chargé, cet organe, sans avoir le temps de se consolider, doit affronter ce dossier «foulard» à caractère passionnel. Plusieurs projets de loi visant à interdire le voile dans la fonction publique et les écoles sont déposés et le Premier ministre Raffarin déclarait à la télévision être favorable à l'interdiction. Comparé à lui, le ministre de l'intérieur Sarkozy, qui veut éviter de «rallumer les guerres de religion» , est parfois qualifié de plus modéré et nuancé par des responsables musulmans, même s'il a rappelé en avril dernier l'obligation de figurer tête nue sur les cartes d'identité. Enfin, le président Chirac ne s'est pas non plus esquivé du débat en prônant la nécessité d' «une solution de sagesse» .

Les acteurs concernés, les hommes politiques, les enseignants, les intellectuels... tous participent à la polémique. Alors que les uns qualifiaient le port du voile d'un « acte politique redoutable» et y voyaient «l'émergence du mouvement fondamentaliste» , les autres le défendaient au nom de la tolérance, de respect du pluralisme et mettaient en garde contre toute démarche qui «alimenterait chez les musulmans le sentiment de victimisation» . Symbole de prison pour les femmes selon les uns, le voile est pour d'autres un élément important de la liberté de conscience.

Là, en France aussi, la peur des concessions hantait. L'éditorialiste du Nouvel Observateur l'a exprimée avec clarté: «Artificielle, cette affaire de voile? Ne vous y trompez pas! Elle est lourde en symboles. Des musulmans français, hier silencieux, aujourd'hui le disent: c'est un test pour la République. Elle résiste ou elle cède. Et elle aura, alors, à céder sur autre chose» .

Des problèmes semblables risquant de resurgir avec les communautés musulmanes de plus en plus nombreuses en Europe, ils doivent être étudiés en profondeur et nécessitent des solutions «de sagesse» si on veut privilégier la coexistence harmonieuse au sein des sociétés pluralistes. Car au-delà de tout aspect administratif/juridique de l'affaire du voile, c'est bien cela qui est sur la table. Le choix est ici entre l'approche nuancée et de la logique de l'exclusion, l'«interdictionnisme».

Ainsi, le foulard n'est qu'un catalyseur des discussions sur l'avenir des musulmans en Europe. Le débat passionne, mais se heurte pour l'instant à la logique d'interdiction simple. Dans ce contexte, la récente décision de la Justice russe constitue un exemple intéressant. Saisie par plusieurs musulmanes contre les dispositions interdisant les photos «voilées» sur les passeports, la Cour Suprême russe avait débouté cette requête en mars 2003 en arguant que l'Etat russe était laïc et que «le Coran n'était pas une source des lois» . La société russe vit aussi des débats ardents sur le sujet. Les plaignantes ayant interjeté appel, la Cour Suprême a rendu en mai une nouvelle décision, cette fois favorable. Qualifiée de «victoire sans précédent» par les responsables religieux musulmans russes, elle apparaît telle une preuve de tolérance plutôt qu'une concession au fondamentalisme religieux. Mais tous ne sont pas convaincus. Ainsi, selon le sondage de la radio moscovite «Echo de Moscou», 64 pc de ses auditeurs la désapprouvent. Néanmoins, cette décision a suscité l'intérêt de la presse turque «conservatrice» qui n'a pas manqué de la répercuter. Elle estime sans doute qu'elle pourrait être un exemple pour son pays comme pour les autres.

A voir, évidemment.

© La Libre Belgique 2003


http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=120650

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AKP se tourne vers les Turcs de l'Europe

L’AKP, le parti au pouvoir à Ankara a secoué l’actualité en Turquie en voulant d’un côté renouer les liens avec l’organisation européenne de Milli Görüs et d’un autre côté en cherchant à lui trouver une alternative.

Par Murat Daoudov, 21 avril 2003

DIRECTIVE AU SUJET DE MILLI GÖRÜS SUSCITE LA POLEMIQUE

Plusieurs quotidiens turcs ont participé à la polémique suscitée par la directive du ministre turc d’affaires étrangères Abdullah Gül, adressée aux ambassades turques à l’étranger, qui les invitait à renouer les contacts avec les milieux de Milli Görüs et de Fethullah Gülen. Alors que les journaux comme AKSAM et SABAH affirmaient que la directive mentionnait explicitement l’organisation de Milli Görüs et les écoles dites " de Fethullah Gülen ", d’autres comme ZAMAN et STAR parlaient plutôt de l’allusion à ces organisations faite dans ladite directive. Quoi qu’il en soit, elle a provoqué les remous dans le camp des " laïcs " qui sont très sensibles à toute tentative de réhabilitation des organisations musulmanes turques basées en Europe (notamment Milli Görüs, perçue comme ennemi du système, et les fondations proches du mouvement de Fethullah Gülen, chef spirituel d’une grande confrérie tombée depuis dernières années en défaveur d’Ankara).

Ministre Gül, qui dans sa concurrence avec Necmettin Erbakan, le leader spirituel du mouvement Milli Görüs vise, selon le journal SABAH, à renforcer les positions du parti AKP auprès des milieux conservateurs musulmans, a donné le 16 avril dernier le signal aux ambassades à l’étranger de renouer et renforcer les contacts avec Milli Görüs. La fin du délai de déchéance des droits civiques de Necmettin Erbakan et son retour à la vie politique active inquiète la direction du parti au pouvoir. La visite récente de ministre d’Etat chargé des affaires religieuses (qui cumule ce mandat avec les affaires touchant aux communautés turques et turcophones) Mehmet Aydin en Allemagne serait à l’origine de cette initiative, car ce dernier y a dû écouter les griefs des dirigeants de Milli Görüs qui se plaignaient d’être négligés et ne pas être admis comme interlocuteurs par les ambassades. Le ministre Aydin de son retour à Ankara en a fait le rapport au gouvernement, qui lui a voulu remédier à cette situation.

Interrogé au sujet de la directive, le ministre Gül a tenté de minimiser l’importance de la directive en disant qu’elle n’était pas la première de ce genre (" une routine ") et que la tradition de conseiller aux missions diplomatiques à l’étranger de se rapprocher avec les communautés turques existait déjà. Mais ici, le gouvernement a surtout voulu prévenir que les organisations des ressortissants turcs, négligées jusqu’ici par l’Etat, soient poussées dans leur isolement vers d’autres organisations et d’autres Etats. " Le but est de les rendre fidèles à l’Etat turc ". Pour Abdullah Gül, il va de soi que les ambassades suivent de près les formations qui sont manifestement hostiles à la Turquie, mais les organisations qui ne sont pas dangereuses (comme MG et autres), il ne faut pas les rejeter et pousser vers les autres. " Sinon, les services de renseignement et d’autres organisations veulent les manipuler. Et là on perd des grandes masses. Ceci est également valable pour les organisations de gauche et même pour certaines associations des Alevis (minorité religieuse en Turquie) ". Ministre Gül, répondant au quotidien SABAH sur la reconnaissance de MG comme organisation extrémiste et terroriste dans le cadre de l’accord avec l’Allemagne, a rappelé qu‘il était " un de ceux qui connaissaient de près l’organisation de Milli Görüs. Si elle va soutenir les terroristes, nous n’allons pas tolérer cela. Il ne faut oublier pourquoi nous l’avions quittée et créé un parti politique différent ".

Le porte-parole du ministère turc d’affaires étrangère Hüseyin Diriöz a fait un communiqué de presse dans lequel il a défendu la dernière directive, qui comme les précédentes visait à " rapprocher les compatriotes et l’Etat ". Sans oublier de souligner que l’Etat se positionnait de manière neutre et observait la même distance avec toutes les organisations, sans faire de distinction sur base de religion, race où origine géographique. Le communiqué a également fait le point sur les écoles, qui fonctionnaient selon les législations des pays d’accueil et en conformité avec les règles sur place, et que les relations entre elles et les missions diplomatiques turques s’entretenaient dans le cadre des principes décrits plus haut. Selon le journal AKSAM, la directive en question demandait aux ambassades de traiter les écoles des fondations proches de Fethullah Gülen (dites " les écoles des Nurcular ") comme des établissements officiels.

Le premier ministre Erdogan n’a pas échappé lui non plus aux interpellations dans ce dossier brûlant. Invité de la télévision ATV, il a déclaré que ladite direction ne citait aucune organisation en particulier, mais toutes les organisations non dangereuses. " Pourquoi nos ambassades ne seraient-elles pas en bon contact avec les formations qui ne sont pas impliquées dans les activités terroristes et qui défendent les intérêts de notre pays ? " a-t-il dit.

" Il y a beaucoup d’organisations des travailleurs turcs à l’étranger. Si elles fonctionnent bien, c’est notre avantage. Mais nous n’avons pas su jusqu’aujourd’hui profiter de cet avantage. Il faut que nous soyons en contact continu avec ces formations. Et peut-être elles vont nous aider à avoir un impact sur les administrations des pays d’accueil. Elles doivent s’intégrer aux pouvoirs centraux et locaux de ces pays, et pour cela elles doivent se coordonner. Mais nos ambassades se plaignent de ne pas pouvoir réunir ces associations. Il faut que nous les réunissions pour le bien de nos compatriotes là-bas et peut-être nous aurons ainsi la possibilité de les propulser aux parlements sur place. "

AKP VEUT UNE ALTERNATIVE A MILLI GÖRÜS

Selon les journaux turcs STAR, AKSAM et MILLIYET, les dirigeants du parti AKP, secoués par la crise liée à l’inclusion de l’organisation Milli Görüs dans la liste des organisations terroristes et dangereuses en Allemagne et par les réactions tant de la part du parti Saadet (SP, le parti de Necmettin Erbakan) que de sa propre base, envisagent de créer parmi les Turcs de l’Europe une formation qui serait une alternative à l’organisation de Milli Görüs. Pour rappel, Milli Görüs avait été inclue dans la liste des organisations terroristes et dangereuses dans le cadre de la Convention entre l’Allemagne et Turquie pour coopération en matière de la sécurité, mais en a été exclue suite aux discussions qui ont eu lieu au sein du parti AKP. Le premier ministre turc Tayyip Erdogan a expédié le vice-président de son parti, chargé des relations extérieures, Saban Disli en Allemagne. Le choix de la ville de Cologne ne doit rien au hasard, c’est le fieffe de la Milli Görüs européenne. Il est chargé de préparer la base pour une ouverture de la représentation de AKP et soumettre son rapport à son président.

Mais le vrai but de cette action est, selon les quotidiens turcs, de préparer le terrain pour attirer la base de MG et la " libérer " de l’influence de Necmettin Erbakan. La plupart des membres de la MG qui compte encore 85 mille d’affiliés et qui est la plus importante organisation des musulmans turcs en Europe, sont favorable à l’ancien président du pari REFAH Necmettin Erbakan.

Surtout après la signature par le premier ministre Erdogan de la convention avec l’Allemagne, qui entre autres, reconnaissait la MG comme une organisation dangereuse, l’AKP a subi des réactions de la part de la Milli Görüs et de sa propre base. Les membres de Milli Görüs, qui lors des élections du 3 novembre dernier ont voté majoritairement en faveur de l’AKP, ont tendance d’entourer Necmettin Erbakan depuis que ce dernier s’est relancé en politique. Erdogan tente, en envoyant Saban Disli en Europe, de regagner les cœurs des sympathisants de Milli Görüs.

Saban Disli, chargé de la mission de préparer le terrain pour une organisation qui représenterait l’AKP, passera après Cologne à Stuttgart, Berlin, Munich. Il a été appris que sur le plan structurel l’organisation ne sera pas une fondation ou association, mais plutôt une représentation. Au même temps, le journal MILLIYET évoque " l’Union " ou " l’Association des Démocrates Conservateurs " comme probable appellation de la nouvelle structure. Les représentations extérieures, qui sont prévues dans les statuts du parti, vont ouvrir, d’après la presse turque, dans les pays où il y une communauté turque, notamment en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en France, en Suisse et en Suède. Dans un deuxième temps elle vont ouvrir dans plusieurs pays allant des USA et Grande-Bretagne jusqu’à l’Afghanistan, l’Irak et l’Indonésie, sans oublier les pays de l’Asie centrale. Elles seront chargées des activités de lobbying et de propagation de la vision de l’AKP parmi les Turcs à l’étranger.

Murat Daoudov

publié sur www.Suffrage-Universel.be

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