Ok

By continuing your visit to this site, you accept the use of cookies. These ensure the smooth running of our services. Learn more.

27/06/2005

Turcs et turcophones en Belgique à l’aube du XXie siècle

Oct 2004 Politique: Voyage au Türkbeekistan
Par Mehmet Koksal

Cet article est paru dans le numéro de Politique daté d'octobre 2004.

Pas un jour se passe sans une belle histoire, nourrie d’un grand souffle originaire des vents violents chargés d’histoire de l’Asie mineure, en plein cœur du Türkbeekistan. Cette longue allée commerçante de la chaussée de Haecht allant de Saint-Josse à Schaerbeek en plein centre de Bruxelles est le théâtre public des campagnes électorales au loukoum, des rumeurs de mariage intervillageoises, des alliances et divorces de la communauté turque. Dent en or qui brille, chemise ouverte et moustache de pasha, l’un des seniors envoie une volée ottomane sur la nuque fraîche du serveur de thé. « Allez, tu as du bol, j’ai entendu qu’on allait te marier ! ». Qui aime bien, châtie bien et fort...

La vie de la diaspora turque en Belgique est à l’opposé de celle des ancêtres. De villageois, ils sont devenus des citadins vivant dans la capitale de l’Europe. Ils étaient de petits paysans travaillant la terre et élevant des bêtes, ils sont devenus des commerçants ou salariés, purs produits des années quatre-vingt de la crise économique. Ils vivaient dans des fermettes entourées de grands espaces presque verts, ils vivent maintenant dans des appartements bruxellois entourés d’autres immeubles semblables où il a fallu souvent installer la première douche. D’un niveau d’éducation se limitant souvent à l’école primaire, ils gèrent actuellement un commerce et un ménage en terre étrangère. Après 40 ans de présence en Belgique, les Turcs se remettent à peine du changement radical de mode de vie pour s’intéresser à la citoyenneté. Qui aime bien, s’installe bien...

Et pourtant, tout est histoire de perception. Lorsqu’on demande à d’autres minorités ethniques la vision qu’ils ont des Turcs, la réponse est constante. L’illusion d’optique présente la communauté turque comme un bloc monolithique, organisée et capable d’agir en groupe de pression ethnique auprès des autorités belges. Soit exactement la vision que développe de plus en plus la même communauté turque à propos des autres minorités installées en Belgique tout en pressant ses membres d’apporter un soutien indéfectible afin de créer ce « vrai lobby » tant désiré. L’obsession du lobby ancrée dans les esprits tente de créer l’homogénéité à partir d’une si forte diversification.

En effet, regardons à travers une analyse croisée la composition de la communauté turque ou turcophone en Belgique. Ainsi, sur l’axe ethnique, on constate une forte diversification des origines (turque, kurde, arménienne, assyrienne,...). Sur l’axe religieux, l’apparente domination islamique en nombre cache souvent les conflits interclaniques et les luttes d’influence entre les différentes obédiences religieuses (tendances étatique, milli görüs, nurcu, suleymanli...). Enfin l’analyse politique (nationalistes, communistes, islamistes, progressistes, libéraux) offre une lecture spécifique pour décoder les activités organisées. Bien entendu, le tout se passe dans ce qu’on appelle l’infrapolitique, cette strate d’activités non visible du grand public et pourtant si forte en tension. ÊEtre d’origine turque en Belgique signifie donc un positionnement sur cette grille hachurée qui en l’espace de quelques temps vous transforme afin de vous préparer à affronter la strate visible, la seule vraie qui compte : l’autre dimension communautaire belge parsemée de conflits linguistiques (francophones-néerlandophones), économiques (wallons-flamands), régionaux (Bruxelles vs Wallonie vs Flandre et vice versa). Qui aime bien, s’amuse bien...

En ouverture de ce thème, Pierre-Yves Lambert et Pierre Vanrie tracent les fondements historiques de la Turquie et en décryptent les diverses composantes ethniques et religieuses. Dans la foulée, Murat Daoudov pose son regard sur les différents groupes de population minoritaires vivant en Turquie et en Belgique, pour en faire ressortir leurs rapports avec la communauté turque. Amertume, colère, haine, reconnaissance, le temps a charrié un lot de sentiments souvent âpres entre trois des grandes communautés vivant sur le territoire de l’ancien empire ottoman ; turque, kurde et arménienne. Nous avons tenté une rencontre entre des représentants de ces groupes en Belgique. Une entreprise ambitieuse qui a finalement pu se réaliser...à distance. Pierre-Yves Lambert s’emploie ensuite à présenter les principales étapes de l’ascension politique de la communauté turque de Belgique. Une rapide et glorieuse progression, polychrome sur le plan idéologique et suivie de près par les autorités turques. De leur côté, Dirk Jabobs, Eric Cillessen et Mehmet Koksal tentent de recomposer le réseau associatif turc bruxellois en mettant en évidence les relations politiques à travers une minutieuse recherche.

Dispersée sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne, la diaspora turque est traversée par des courants religieux multiples. Meryem Kanmaz en décrit les contours et différencie l’islam turc de l’islam européen naissant. Toujours sur le registre religieux, Mehmet Koksal a poussé les portes du nouvel Exécutif des musulmans de Belgique en formation. Pour y découvrir des rapports tendus entre certains représentants musulmans et les autorités belges ainsi qu’une omniprésence d’Ankara dans les négociations

Enfin, deux rencontres terminent ce voyage. L’une avec Hüsniye Kardas, styliste, l’autre avec Rabia Kaçar, réalisatrice de documentaires, qui nous content leur enfance et leur parcours d’émancipation à partir de leur communauté d’origine.

Le thème a été coordonné par Mehmet Koksal.

http://politique.eu.org/archives/2004/10/7.html

00:58 Posted in Article | Permalink | Comments (0)

La rentrée avec ou sans foulard?

LLB 08.09.2003
Spiritualités


Faut-il permettre le port du voile au nom du droit à la différence? Ou l'interdire pour préserver la neutralité de l'enseignement? Petit tour non exhaustif des arguments en jeu.


Belga


ALAIN FINKIELKRAUT philosophe, écrivain français

(...) L'école est aussi un espace sacré. Devant la culture on s'incline, on baisse la tête, et cela je crois qu'on peut le demander à tous. Or ce sacré de l'école, le social ne le supporte pas. Le social n'accepte rien en dehors de sa loi. Puisque, dit-on, chacun s'habille comme il le veut dans la société, chacun doit pouvoir le faire dans l'école - à part les professeurs, bien entendu, eux seuls étant astreints à une obligation de neutralité.

Je ne pense pas qu'il en soit ainsi. L'école a ses règles, l'école a ses lois, et l'Islam pose un problème spécifique dans la mesure où on a le sentiment que certains de ses représentants le perçoivent, de plus en plus, comme une communauté qui doit d'abord affirmer ses revendications et qui ne reconnaîtra sa francité que le jour où celles-ci seront satisfaites. (...)

L'intégration passe par la clarté, la fixation d'un cadre. Tant qu'il n'y a pas de cadre, certains musulmans pourront continuer à se sentir extérieurs à la France.

ETIENNE BALIBAR, SAÏD BOUAMANA,... Extrait de la lettre ouverte «Oui, à la laïcité, non aux lois d'exception»

(...) Nous refusons aussi la focalisation sur le foulard islamique parce qu'elle s'inscrit dans un mouvement d'ensemble qu'il est urgent d'enrayer: la colonisation de tous les espaces de la vie sociale par des logiques punitives. Après la fraude dans le métro, le stationnement dans les halls d'immeuble et l'outrage au drapeau ou à l'hymne national, c'est l'outrage à enseignant qui est devenu passible de prison. L'exclusion des élèves voilées s'inscrit dans cette surenchère punitive, au détriment des interrogations et des solutions politiques et pédagogiques.

Elle ne peut donc être ressentie par l'ensemble des élèves que comme une mesure brutale et discriminatoire, venant redoubler toutes les injustices que subissent déjà, dans leurs quartiers, les jeunes des milieux populaires, notamment ceux qui sont issus de l'immigration post-coloniale. Le minimum d'estime réciproque requis entre professeurs et élèves pour que la relation pédagogique ait lieu risque d'être gravement compromis.

Patrick TRAUBE, psychologue, écrivain

La chose est connue: la plus efficace des publicités pour un produit douteux (film, livre,...), c'est sa censure. Précepte éprouvé: pour rendre un comportement attractif pour un adolescent, interdisez-le! Dès lors, si l'effet escompté est de décourager le port du foulard (ou de tout autre «marqueur» culturel), l'effet prévisible sera son exact opposé. En prime, on aura offert le pain béni aux extrémistes, experts dans l'art de récupérer le sentiment d'incompréhension vécu par les jeunes allochtones.

Plus grave. Une inconséquence sur le plan des valeurs. «Il faut privilégier ce qui nous ressemble», nous dit-on. Intention louable, sans doute. Mais à quel prix? Au prix du déni des différences qui nous identifient et nous permettent d'exister aux yeux des autres? Entre «rassembler» et «ressembler», il n'y a que la distance d'une lettre. Sous le blanc manteau de l'argumentaire «rassembleur», j'entrevois l'insigne noir du Grand Uniformisateur. Nier les différences, c'est dénier le réel.

Un directeur d'établissement en Communauté française

J'entends les arguments de ceux qui plaident en faveur du port du foulard. Il s'agit notamment de psychologues qui se placent dans une perspective individuelle: ils se soucient d'abord de la personne de l'élève.

C'est un souci que partagent les enseignants, mais si l'école prend en compte - et comment! - cette préoccupation, elle doit aussi s'interroger dans une perspective sociétale, celle de jeunes qui doivent s'intégrer, celle d'une société qui définit les valeurs à partager... et les autres. En tant qu'institution, l'école officielle doit quelquefois dépasser le développement personnel de quelques élèves pour contribuer à un de ses objectifs plus vaste et d'ordre général: construire la société dans laquelle nous voulons vivre. Et quelle sera-t-elle? Une juxtaposition d'individus avec des droits différents (dont celui de donner moins de droits à une femme?) ou une communauté qui partage le plus grand dénominateur commun? Une juxtaposition de ghettos ou l'union de personnes avec des mêmes obligations?

MURAT DAOUDOV Membre du Conseil des Bruxellois d'origine étrangère (CBOE)

Des deux côtés, c'est la peur. La peur des concessions. De côté des musulmans, la peur de voir venir d'autres mesures discriminatoires, de côté des autorités l'inquiétude, même si camouflée, de céder devant «la montée de l'intégrisme». Après le foulard, quelles seront les mesures ou exigences suivantes?

MALEK BOUTIH, ancien président de SOS Racisme

L'école ne doit pas être le champ de bataille des influences religieuses: le foulard ne doit pas entrer à l'école. Ca ne peut plus être discutable et contestable. Une jeune fille peut porter le foulard en France, la Constitution la protège dans son droit de porter le foulard. Mais certains lieux sont des lieux communs, où la croyance des uns ne peut pas déterminer la croyance des autres.

MICHEL STASZEWSKI Professeur dans l'enseignement secondaire

Prétendre lutter contre l'obligation (non démontrée dans la plupart des cas) qui serait faite aux jeunes filles musulmanes de porter un foulard en leur interdisant de le faire m'apparaît comme éminemment contre-productif: on prétend soigner le mal par le mal; on répond à une contrainte supposée par une autre contrainte. Et si l'objectif est, par ce moyen, d'empêcher un repli identitaire, je suis persuadé que c'est l'effet inverse qui est induit. En plus des élèves directement concernées, ce sentiment de non-reconnaissance, de non-acceptation de certaines de leurs particularités culturelles touche bien évidemment leurs familles et, au-delà, une grande partie de leur communauté culturelle.

SÉBASTIEN VAN DROOGHENBROECK Chargé de cours aux Facultés universitaires Saint-Louis

Le fait est qu'il y a une absence de cadre en Communauté française: il n'existe pas de décret qui interdise formellement le port du foulard, mais pas plus qu'il n'en existe qui interdise... de l'interdire. Si l'on se réfère aux normes supérieures, la Constitution belge comme la convention des droits de l'homme consacrent la liberté d'expression, religieuse notamment, mais pas de manière absolue. Dans un contexte particulier, comme l'école, la liberté de croyance quand elle se transforme en prosélytisme peut ainsi porter atteinte à la liberté de conviction d'autres. Il me semble très difficile aujourd'hui de trancher dans un sens ou dans l'autre, de manière abstraite.

La Cour européenne des droits de l'homme étudie actuellement le cas d'étudiantes turques interdites de porter le foulard à l'université: son jugement sera intéressant. Mais, en attendant, le cas par cas me semble le plus sage.

© La Libre Belgique 2003



http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=132031

00:56 Posted in Opinion | Permalink | Comments (0)

Le voile agitateur?

SOCIÉTÉ
LLB 14.06.2003

Fantasmes, peurs et concessions, en Belgique, en France, en Turquie ou en Russie, le voile s'impose en «agitateur» et en catalyseur des discussions sur l'avenir des musulmans en Europe


MURAT DAOUDOV, membre du Conseil des Bruxellois d'origine étrangère (CBOE)

Le voile occupe ces derniers mois l'actualité de plusieurs pays, devenant le sujet de la controverse publique. Dans les écoles, la fonction publique ou sur les cartes d'identité il provoque des débats passionnés.

En Belgique, son irruption dans l'actualité avec la manifestation devant l'école Athénée Bruxelles II à Laeken en fera sans doute un des dossiers-test pour le nouveau gouvernement. De nombreuses filles musulmanes voilées et non se sont mobilisées pour protester contre l'interdiction du foulard jugée comme un signe de l'intolérance à leurs valeurs et la liberté de conscience. Loin d'être un élément de prosélytisme, le voile est pour elles un symbole de liberté et elles réclament le droit de vivre leurs particularités dans une société respectueuse de sa diversité.

L'initiative d'interdire le foulard dans les écoles a inévitablement blessé les susceptibilités de nombreux musulmans. Au-delà d'une simple question qui relève de l'ordre intérieur scolaire, elle s'inscrit pour eux dans la politique qui les vise et cherche à limiter leurs acquis sur fond de la montée de l'islamophobie. Et dans l'absence de véritable dialogue, les questions comme celle du voile deviennent vite des champs d'affrontement pour des camps opposés.

Des deux côtés, c'est la peur. La peur des concessions. De côté des musulmans, la peur de voir venir d'autres mesures discriminatoires, de côté des autorités l'inquiétude, même si camouflée, de céder devant «la montée de l'intégrisme». Après le foulard, quelles seront les mesures ou exigences suivantes? Le foulard pourrait-il devenir un casse-tête futur pour le gouvernement et la manifestation à Laeken en est-elle un signe précurseur? Il semble bien que oui.

Mais la Belgique n'est pas seule à affronter ce dossier épineux. Le voile a constitué une épreuve importante devant le gouvernement turc du parti AKP («islamistes modérés» ou «conservateurs démocrates» selon les uns ou les autres). La question du voile provoque des tensions et le parti au pouvoir a dû vivre une véritable crise en avril dernier, quand le président de la République, le chef de l'état-major et des hauts bureaucrates ont boycotté la réception officielle au parlement à l'occasion de la fête nationale. En cause: les épouses voilées des responsables du parti au pouvoir. Au yeux des défenseurs de la laïcité stricte, le nouveau gouvernement veut «détourner la Turquie de la voie de modernisation et l'éloigner du monde civilisé» en banalisant le voile dans l'administration. «Le sommet de l'Etat s'est heurté au foulard» a ironisé un journaliste. Le président du parlement turc (membre de l'AKP), au centre des critiques émanant de la presse pro «kémaliste», s'est vu attribuer par les médias la phrase «le vrai danger est le décolleté (et pas le voile)». Même s'il l'a démentie, cette phrase illustre bien à quel point l'habillement est devenu le symbole des camps opposés en Turquie.

Là aussi, les adversaires se défendaient avec ardeur. Alors que les uns voyaient dans l'irruption du voile une tentative de remise en cause du caractère laïc de l'Etat, les autres arguaient que la Turquie de XXIe siècle devait dépasser les vieux fantasmes de la «menace intégriste». Remarquablement, les camps se référaient tous les deux à l'Occident: quand les «conservateurs musulmans» se référaient aux Etats-Unis (le Premier ministre Erdogan n'avait-il pas dû y envoyer ses filles à l'université, car voilées, elles ne pouvaient pas étudier dans leur pays?), les fervents défenseurs de laïcité s'inspiraient de la France où la volonté d'interdire le port du voile ravivait aussi des débats passionnés.

Dans l'Hexagone, le «problème du foulard» a vu officiellement le jour voici près de quatorze ans, mais s'est reposé avec une certaine acuité devant le nouveau gouvernement. Le Premier ministre Raffarin venait d'achever un chantier important, celui de création du Conseil français du culte musulman (CFCM). Naissant dans un contexte chargé, cet organe, sans avoir le temps de se consolider, doit affronter ce dossier «foulard» à caractère passionnel. Plusieurs projets de loi visant à interdire le voile dans la fonction publique et les écoles sont déposés et le Premier ministre Raffarin déclarait à la télévision être favorable à l'interdiction. Comparé à lui, le ministre de l'intérieur Sarkozy, qui veut éviter de «rallumer les guerres de religion» , est parfois qualifié de plus modéré et nuancé par des responsables musulmans, même s'il a rappelé en avril dernier l'obligation de figurer tête nue sur les cartes d'identité. Enfin, le président Chirac ne s'est pas non plus esquivé du débat en prônant la nécessité d' «une solution de sagesse» .

Les acteurs concernés, les hommes politiques, les enseignants, les intellectuels... tous participent à la polémique. Alors que les uns qualifiaient le port du voile d'un « acte politique redoutable» et y voyaient «l'émergence du mouvement fondamentaliste» , les autres le défendaient au nom de la tolérance, de respect du pluralisme et mettaient en garde contre toute démarche qui «alimenterait chez les musulmans le sentiment de victimisation» . Symbole de prison pour les femmes selon les uns, le voile est pour d'autres un élément important de la liberté de conscience.

Là, en France aussi, la peur des concessions hantait. L'éditorialiste du Nouvel Observateur l'a exprimée avec clarté: «Artificielle, cette affaire de voile? Ne vous y trompez pas! Elle est lourde en symboles. Des musulmans français, hier silencieux, aujourd'hui le disent: c'est un test pour la République. Elle résiste ou elle cède. Et elle aura, alors, à céder sur autre chose» .

Des problèmes semblables risquant de resurgir avec les communautés musulmanes de plus en plus nombreuses en Europe, ils doivent être étudiés en profondeur et nécessitent des solutions «de sagesse» si on veut privilégier la coexistence harmonieuse au sein des sociétés pluralistes. Car au-delà de tout aspect administratif/juridique de l'affaire du voile, c'est bien cela qui est sur la table. Le choix est ici entre l'approche nuancée et de la logique de l'exclusion, l'«interdictionnisme».

Ainsi, le foulard n'est qu'un catalyseur des discussions sur l'avenir des musulmans en Europe. Le débat passionne, mais se heurte pour l'instant à la logique d'interdiction simple. Dans ce contexte, la récente décision de la Justice russe constitue un exemple intéressant. Saisie par plusieurs musulmanes contre les dispositions interdisant les photos «voilées» sur les passeports, la Cour Suprême russe avait débouté cette requête en mars 2003 en arguant que l'Etat russe était laïc et que «le Coran n'était pas une source des lois» . La société russe vit aussi des débats ardents sur le sujet. Les plaignantes ayant interjeté appel, la Cour Suprême a rendu en mai une nouvelle décision, cette fois favorable. Qualifiée de «victoire sans précédent» par les responsables religieux musulmans russes, elle apparaît telle une preuve de tolérance plutôt qu'une concession au fondamentalisme religieux. Mais tous ne sont pas convaincus. Ainsi, selon le sondage de la radio moscovite «Echo de Moscou», 64 pc de ses auditeurs la désapprouvent. Néanmoins, cette décision a suscité l'intérêt de la presse turque «conservatrice» qui n'a pas manqué de la répercuter. Elle estime sans doute qu'elle pourrait être un exemple pour son pays comme pour les autres.

A voir, évidemment.

© La Libre Belgique 2003


http://www.lalibre.be/article.phtml?id=11&subid=118&art_id=120650

00:54 Posted in Opinion | Permalink | Comments (0)

AKP se tourne vers les Turcs de l'Europe

L’AKP, le parti au pouvoir à Ankara a secoué l’actualité en Turquie en voulant d’un côté renouer les liens avec l’organisation européenne de Milli Görüs et d’un autre côté en cherchant à lui trouver une alternative.

Par Murat Daoudov, 21 avril 2003

DIRECTIVE AU SUJET DE MILLI GÖRÜS SUSCITE LA POLEMIQUE

Plusieurs quotidiens turcs ont participé à la polémique suscitée par la directive du ministre turc d’affaires étrangères Abdullah Gül, adressée aux ambassades turques à l’étranger, qui les invitait à renouer les contacts avec les milieux de Milli Görüs et de Fethullah Gülen. Alors que les journaux comme AKSAM et SABAH affirmaient que la directive mentionnait explicitement l’organisation de Milli Görüs et les écoles dites " de Fethullah Gülen ", d’autres comme ZAMAN et STAR parlaient plutôt de l’allusion à ces organisations faite dans ladite directive. Quoi qu’il en soit, elle a provoqué les remous dans le camp des " laïcs " qui sont très sensibles à toute tentative de réhabilitation des organisations musulmanes turques basées en Europe (notamment Milli Görüs, perçue comme ennemi du système, et les fondations proches du mouvement de Fethullah Gülen, chef spirituel d’une grande confrérie tombée depuis dernières années en défaveur d’Ankara).

Ministre Gül, qui dans sa concurrence avec Necmettin Erbakan, le leader spirituel du mouvement Milli Görüs vise, selon le journal SABAH, à renforcer les positions du parti AKP auprès des milieux conservateurs musulmans, a donné le 16 avril dernier le signal aux ambassades à l’étranger de renouer et renforcer les contacts avec Milli Görüs. La fin du délai de déchéance des droits civiques de Necmettin Erbakan et son retour à la vie politique active inquiète la direction du parti au pouvoir. La visite récente de ministre d’Etat chargé des affaires religieuses (qui cumule ce mandat avec les affaires touchant aux communautés turques et turcophones) Mehmet Aydin en Allemagne serait à l’origine de cette initiative, car ce dernier y a dû écouter les griefs des dirigeants de Milli Görüs qui se plaignaient d’être négligés et ne pas être admis comme interlocuteurs par les ambassades. Le ministre Aydin de son retour à Ankara en a fait le rapport au gouvernement, qui lui a voulu remédier à cette situation.

Interrogé au sujet de la directive, le ministre Gül a tenté de minimiser l’importance de la directive en disant qu’elle n’était pas la première de ce genre (" une routine ") et que la tradition de conseiller aux missions diplomatiques à l’étranger de se rapprocher avec les communautés turques existait déjà. Mais ici, le gouvernement a surtout voulu prévenir que les organisations des ressortissants turcs, négligées jusqu’ici par l’Etat, soient poussées dans leur isolement vers d’autres organisations et d’autres Etats. " Le but est de les rendre fidèles à l’Etat turc ". Pour Abdullah Gül, il va de soi que les ambassades suivent de près les formations qui sont manifestement hostiles à la Turquie, mais les organisations qui ne sont pas dangereuses (comme MG et autres), il ne faut pas les rejeter et pousser vers les autres. " Sinon, les services de renseignement et d’autres organisations veulent les manipuler. Et là on perd des grandes masses. Ceci est également valable pour les organisations de gauche et même pour certaines associations des Alevis (minorité religieuse en Turquie) ". Ministre Gül, répondant au quotidien SABAH sur la reconnaissance de MG comme organisation extrémiste et terroriste dans le cadre de l’accord avec l’Allemagne, a rappelé qu‘il était " un de ceux qui connaissaient de près l’organisation de Milli Görüs. Si elle va soutenir les terroristes, nous n’allons pas tolérer cela. Il ne faut oublier pourquoi nous l’avions quittée et créé un parti politique différent ".

Le porte-parole du ministère turc d’affaires étrangère Hüseyin Diriöz a fait un communiqué de presse dans lequel il a défendu la dernière directive, qui comme les précédentes visait à " rapprocher les compatriotes et l’Etat ". Sans oublier de souligner que l’Etat se positionnait de manière neutre et observait la même distance avec toutes les organisations, sans faire de distinction sur base de religion, race où origine géographique. Le communiqué a également fait le point sur les écoles, qui fonctionnaient selon les législations des pays d’accueil et en conformité avec les règles sur place, et que les relations entre elles et les missions diplomatiques turques s’entretenaient dans le cadre des principes décrits plus haut. Selon le journal AKSAM, la directive en question demandait aux ambassades de traiter les écoles des fondations proches de Fethullah Gülen (dites " les écoles des Nurcular ") comme des établissements officiels.

Le premier ministre Erdogan n’a pas échappé lui non plus aux interpellations dans ce dossier brûlant. Invité de la télévision ATV, il a déclaré que ladite direction ne citait aucune organisation en particulier, mais toutes les organisations non dangereuses. " Pourquoi nos ambassades ne seraient-elles pas en bon contact avec les formations qui ne sont pas impliquées dans les activités terroristes et qui défendent les intérêts de notre pays ? " a-t-il dit.

" Il y a beaucoup d’organisations des travailleurs turcs à l’étranger. Si elles fonctionnent bien, c’est notre avantage. Mais nous n’avons pas su jusqu’aujourd’hui profiter de cet avantage. Il faut que nous soyons en contact continu avec ces formations. Et peut-être elles vont nous aider à avoir un impact sur les administrations des pays d’accueil. Elles doivent s’intégrer aux pouvoirs centraux et locaux de ces pays, et pour cela elles doivent se coordonner. Mais nos ambassades se plaignent de ne pas pouvoir réunir ces associations. Il faut que nous les réunissions pour le bien de nos compatriotes là-bas et peut-être nous aurons ainsi la possibilité de les propulser aux parlements sur place. "

AKP VEUT UNE ALTERNATIVE A MILLI GÖRÜS

Selon les journaux turcs STAR, AKSAM et MILLIYET, les dirigeants du parti AKP, secoués par la crise liée à l’inclusion de l’organisation Milli Görüs dans la liste des organisations terroristes et dangereuses en Allemagne et par les réactions tant de la part du parti Saadet (SP, le parti de Necmettin Erbakan) que de sa propre base, envisagent de créer parmi les Turcs de l’Europe une formation qui serait une alternative à l’organisation de Milli Görüs. Pour rappel, Milli Görüs avait été inclue dans la liste des organisations terroristes et dangereuses dans le cadre de la Convention entre l’Allemagne et Turquie pour coopération en matière de la sécurité, mais en a été exclue suite aux discussions qui ont eu lieu au sein du parti AKP. Le premier ministre turc Tayyip Erdogan a expédié le vice-président de son parti, chargé des relations extérieures, Saban Disli en Allemagne. Le choix de la ville de Cologne ne doit rien au hasard, c’est le fieffe de la Milli Görüs européenne. Il est chargé de préparer la base pour une ouverture de la représentation de AKP et soumettre son rapport à son président.

Mais le vrai but de cette action est, selon les quotidiens turcs, de préparer le terrain pour attirer la base de MG et la " libérer " de l’influence de Necmettin Erbakan. La plupart des membres de la MG qui compte encore 85 mille d’affiliés et qui est la plus importante organisation des musulmans turcs en Europe, sont favorable à l’ancien président du pari REFAH Necmettin Erbakan.

Surtout après la signature par le premier ministre Erdogan de la convention avec l’Allemagne, qui entre autres, reconnaissait la MG comme une organisation dangereuse, l’AKP a subi des réactions de la part de la Milli Görüs et de sa propre base. Les membres de Milli Görüs, qui lors des élections du 3 novembre dernier ont voté majoritairement en faveur de l’AKP, ont tendance d’entourer Necmettin Erbakan depuis que ce dernier s’est relancé en politique. Erdogan tente, en envoyant Saban Disli en Europe, de regagner les cœurs des sympathisants de Milli Görüs.

Saban Disli, chargé de la mission de préparer le terrain pour une organisation qui représenterait l’AKP, passera après Cologne à Stuttgart, Berlin, Munich. Il a été appris que sur le plan structurel l’organisation ne sera pas une fondation ou association, mais plutôt une représentation. Au même temps, le journal MILLIYET évoque " l’Union " ou " l’Association des Démocrates Conservateurs " comme probable appellation de la nouvelle structure. Les représentations extérieures, qui sont prévues dans les statuts du parti, vont ouvrir, d’après la presse turque, dans les pays où il y une communauté turque, notamment en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en France, en Suisse et en Suède. Dans un deuxième temps elle vont ouvrir dans plusieurs pays allant des USA et Grande-Bretagne jusqu’à l’Afghanistan, l’Irak et l’Indonésie, sans oublier les pays de l’Asie centrale. Elles seront chargées des activités de lobbying et de propagation de la vision de l’AKP parmi les Turcs à l’étranger.

Murat Daoudov

publié sur www.Suffrage-Universel.be

00:50 Posted in Article | Permalink | Comments (0)

PORTRAIT : Murat Daoudov

Quand Murat Daoudov quitte la Tchétchénie, son pays natal, en 1993, pour aller étudier à l'université d'Istanbul, il ignore qu'il s'agit pratiquement d'un aller sans retour pour l'Occident, et que commence pour lui une autre vie, à la fois très enrichissante et très éprouvante.

En 1994, la guerre éclate en Tchétchénie. Il milite activement contre cette guerre, mais il se voit contraint de quitter la Turquie, en compagnie de sa femme, pour la Belgique où il arrive début 1998 et demande l'asile politique. De la Belgique, il connaît d'abord les centres de réfugiés de la Croix Rouge, où il apprend le français avec des réfugiés rwandais. La famille Daoudov, la première famille tchétchène dans la capitale, s'installe à Bruxelles, où ils se sentent tout de suite " chez eux ", en raison du caractère cosmopolite et multiculturel de la ville.

Très vite, Murat décide de s'impliquer dans la vie associative et sociale. Ayant lui-même réussi à se trouver une place dans notre société, il décide d'aider ceux qui ont plus de difficultés à le faire : il les épaule dans leurs démarches avec l'administration, les CPAS, les hôpitaux, les propriétaires…

Et puis, en 1999, une nouvelle guerre éclate en Tchétchénie, plus violente encore que la première. Mû par le sentiment de solidarité et le devoir d'agir, Murat se bat pour rompre le silence qui entoure ce drame en Europe, et en Belgique en particulier. Ensemble, nous créons le Comité Tchétchénie Belgium, qui sera soutenu par des personnalités du monde politique, culturel, associatif, … et mènera diverses actions pour sensibiliser les dirigeants, les médias et le grand public.

Tout en menant ce combat pour son pays d'origine, Murat continue son intégration dans la société belge.

Après diverses expériences dans la vie associative, il devient le premier membre issu des anciennes républiques soviétiques au sein du Conseil des Bruxellois d'Origine Étrangère, un organe de la Ville de Bruxelles.

Lors du Sommet européen de Laeken de décembre 2001, il est engagé par le Service de la Jeunesse comme chef d'équipe des stewards de la Ville de Bruxelles, chargés d'encadrer les dizaines de milliers de manifestants rassemblés dans les rues de la Ville et de prévenir tout dérapage.

Murat s'investit également dans la vie de son quartier. Il participe activement à la création et à la gestion de l'asbl " Adultes de Quartier-Laeken ". Cette asbl s'organise pour que de petits groupes d'adultes puissent sillonner le quartier à la nuit tombée, pour éviter que les jeunes traînent dans les rues, avec tout ce que cela comporte comme risque de petite délinquance.

La solidarité, la famille de Murat essaie également de la vivre en son sein, au quotidien. Elle s'est en effet proposée comme " famille d'accueil " à Bruxelles, pour recueillir des enfants qui se retrouvent sans abri suite à une situation imprévue (accident des parents, parents alcooliques,…) et à qui il faut trouver une famille d'accueil pour quelques jours, le temps que les autorités compétentes apportent une solution durable au problème.

5 ans à peine après son arrivée en Belgique, dans des conditions difficiles, Murat est un exemple parfait d'intégration réussie. La Belgique lui a beaucoup donné, mais il le lui rend bien. Et son désir de " servir " sa seconde patrie est plus grand encore depuis qu'il a reçu le statut de réfugié politique en décembre dernier, après des années de démarches laborieuses.

(georgesdallemagne.be, février 2003 )


00:48 Posted in Who's who? | Permalink | Comments (0)

Intégrer les jeunes d'origine étrangère

Carte blanche
Le Soir, 8 janvier 2002


Depuis les attentats à New York et les enquêtes conséquentes sur la piste européenne des réseaux terroristes, les yeux se sont tournés vers les communautés musulmanes en Europe.

Leur vie, leur composition et leur structure ont été mises sous la loupe, car, paraît-il, certaines de leurs formations fonctionneraient comme des foyers de recrutement des jeunes candidats terroristes.

Des amalgames de type "musulman-terrorisme-danger" s'étant tout de suite faits et des nouvelles des attaques racistes contre des musulmans aux USA et ailleurs ayant été relatées par les médias, les musulmans d'Europe et particulièrement la communauté musulmane de Belgique se sont sentis visés et se sont préoccupés. Certains même craignaient, il est vrai, de pareilles attaques dans notre pays.

Récemment, quelques politiciens hollandais ont appelé à "mettre dehors les imams qui prêchent le fondamentalisme", et cette nouvelle a été répercutée par la presse néerlandophone belge. Il est évident que ce sont des messages pleins de nouveaux amalgames et soupçons, et le grand danger ici est de blesser encore la susceptibilité d'une communauté entière.

Or, pour éradiquer tout extrémisme de la base, le seul remède est une plus grande ouverture et le rapprochement de la communauté musulmane avec le reste de la société belge. Car depuis quelques années la Belgique assiste à un changement important : les communautés d'origine étrangère, qui vivaient un certain repli sur elles-mêmes, marquées par un désintérêt pour la vie sociale et politique belge, se transforment en de vraies parties intégrantes de la société belge.

Et de l'autre côté, le grand public lui aussi s'habitue à voir sur sa scène politique, sociale, culturelle ou médiatique des acteurs valables issus de l'immigration. Ce phénomène a été grandement illustré par les succès électoraux des "nouveaux Belges" et leur intégration dans les rangs politiques et de l'administration.
Pour les communautés d'origine étrangère, cela a eu un effet stimulateur et accélérateur pour une large participation à la citoyenneté. Ce phénomène a aussi laissé une empreinte sur la vie quotidienne de ces communautés.

L'exemple explicite de la communauté turque : la dualité de la vie (le corps en Belgique, mais l'âme en Turquie -car c'est l'actualité de Turquie dont on parlait en regardant exclusivement la TV turque et en lisant les journaux turcs dans de nombreux cafés et associations) cède progressivement la place à l'intégration et à un réel intérêt pour la vie et l'actualité belge.

Alors qu'auparavant la vie sociale et culturelle était liée exclusivement à la Turquie, que les associations de la communauté n'étaient que des antennes des formations politiques turques, que la seule piste pour s'épanouir et faire une carrière politique et sociale pour un jeune était les activités au sein d'une association en Belgique pour prendre plus tard sa place dans un des piliers de la scène politique turque, aujourd'hui la jeune génération se fait des projets liés à la Belgique, l'associatif s'adapte progressivement à cette nouvelle conjoncture, et l'habitué des cafés s'informe davantage et mieux sur la composition du paysage politique belge.


Contre l'extrémisme,
il faut rapprocher
la communauté
musulmane du reste
de la société belge


La préoccupation des autorités quant au manque de transparence de certaines formations de la communauté musulmane, leur influence sur la jeune génération pouvaient jadis mener parfois à des amalgames de type "ce jeune fréquente telle association, il est donc ceci ou cela" et même dans certains cas, à faire une croix sur son avenir.

Or, très souvent, l'absence pour ce jeune d'un projet lié à la société belge, son sentiment d'être étranger à cette société, étaient à l'origine de son attachement à des formations qui l'encadraient et, plus important, lui offraient une activité sociale et un sens à sa vie.

Maintenant que ce cap semble être franchi, la communauté musulmane commence à se voir partie prenante, de plein droit, de la société belge, enthousiasmée par les "balayeurs de terrain" -ses premiers hommes et femmes politiques-, et démontre la volonté d'une plus grande intégration.

Aussi est-il d'une importance vitale de ne pas se laisser entraîner par des paranoïas "anti-islamistes" et des amalgames blessants. Que les esprits échauffés ne nous emportent pas, et que les recettes faciles comme "dehors !" ne nous trompent pas ! Quel est le terrain propice à la révolte et au surgissement des jeunes fanatiques prêts à toute destruction ? C'est l'injustice et l'hostilité de la société dans laquelle on vit et l'incrédibilité du système politique. Cela crée le mécontentement, la haine et alimente les rangs extrémistes.

Seule l'appellation des recettes proposées varie d'une idéologie à l'autre : si pour inverser ce monde plein d'injustice, les marxistes d'extrême gauche appellent à la révolution, les islamistes appellent au djihad.

Rappelons-nous quand même la différence cardinale entre la démocratie et l'extrémisme. Quand les mouvances extrémistes, que ce soit pour le djihad ou pour la révolution, appellent à changer immédiatement ce monde par la force, la recette de la démocratie est bien le contraire : si on veut changer les choses, il faut s'impliquer davantage dans la citoyenneté et en prendre personnellement la gestion.

Et justement, le chemin d'assèchement des bourbiers extrémistes passe par le rapprochement des communautés, l'ouverture et la plus grande participation des jeunes générations allochtones à la vie sociale et politique de la Belgique. Et une éducation meilleure, car sa lumière est le meilleur remède contre l'obscurantisme fanatique. Et surtout pas d'amalgames accusateurs, de soupçons, d'étiquettes et de nouveaux isolements !

Dans ce cadre, un grand succès et un exemple à suivre fut l'initiative des autorités d'impliquer les jeunes allochtones dans le travail de prévention lors du sommet de Laeken.

Passés au début quasi inaperçus par les médias, ils ont fourni un travail important d'accompagnement et d'encadrement des manifestants, de prévention d'implication des jeunes dans les incidents et provocations. Des jeunes des quartiers populaires ont été engagés comme stewards par la Ville de Bruxelles et l'ont représentée en portant ces trois jours les vestes du Service de la Jeunesse.

Le plus grand gain pour eux n'était pas la rémunération, mais bien la participation avec les autorités dans l'organisation et le déroulement de ce grand événement. La fierté de la tâche accomplie et d'appartenance à leurs quartiers, à leur ville et à la Belgique, l'hôte du sommet, se lisait parfaitement dans leurs visages.


Murat Daoudov
Membre du Conseil des Bruxellois d'origine étrangère, ancien chef d'équipe des stewards de la Ville de Bruxelles au sommet de Laeken

Le titre est de la rédaction.

00:36 Posted in Opinion | Permalink | Comments (0)

10/04/2002

Murat Daoudov, ergens tussen Grozni en Laken

De Nekker - April 2002
Rik Fobelets - Brussel

 

 

In de voorbije maanden zag u op de televisie vaak de beelden van het stukgeschoten Kaboel. Een andere hoofdstad, Grozni, en niet eens zo ver  weg van Afghanistan is evenzeer vernield. Alleen zien we haast geen beelden van de hoofdstad van Tjetjenië in onze journaals. Sinds enkele jaren leeft echter in Laken Murat Daoudov, Tjetjeens politiek vluchteling en een heuse polyglot die naast vloeiend Nederlands en Tjetjeens, ook Russisch, Turks, Arabisch, Frans en Engels spreekt. 

 

De Nekker: Hoe belandt een Tjetjeen in Laken?
Murat Daoudov: Heel veel Tsjetjenen leven in de diaspora. In de 18e eeuw bezetten de Russische tsaren vele landen. Ook Tjetjenië viel ten prooi van hun honger naar meer land. Sindsdien werd onze cultuur en taal langzaam verdrukt door de heersers uit Rusland. Het trieste hoogtepunt was de Tweede Wereldoorlog toen Stalin in 1944 heel veel Tjetjenen deporteerde naar andere delen van de U.S.S.R. Heel wat Russen werden door hem gedwongen om naar ons land te verhuizen. Het meest ingrijpende was de beslissing om het Tjetjeens te bannen uit onze scholen. Ik studeerde daarom in het Russisch. Voor mijn hogere studies verliet ik Tjetjenië. Mijn disapora begon dan ook in 1993 toen ik in Instanboel journalistiek ging studeren aan  de plaatselijke universiteit. Sindsdien ben ik niet meer in mijn land geweest.

 

De Nekker: Waarom?
Murat Daoudov: Alles was redelijk rustig tot bij het uiteenvallen van de vroegere Sovjetunie. Heel wat voormalige republieken zagen de kans om  onafhankelijk te worden. Zo  ook Tjetjenië. Eindelijk na vele honderden jaren was de  onafhankelijkheid in zicht.  Maar zo zagen de Russen het niet.  Voor hen was Tjetjenië  een heuse kolonie die hen heel wat olie en gas opleverde met een plaatselijke bevolking die toch geen cultuur had. Zo ontstond het eerste conflict begin jaren  negentig. Eigenlijk was die oorlog een echte dekolonisatiestrijd. De Russen gingen heel brutaal te werk en vernielden heel wat steden en dorpen. Toch kreeg Tjetjenie  een vorm van autonomie tussen 1996  en 1999.  En dan is het tweede drama gebeurd. Omdat er geen rechtstaat meer was kregen zowel de maffia als extreem religieuze groepen steeds meer macht. De democratische krachten kwamen niet meer aan bod. Het land vergleed in corruptie en 1999 werden een aantal bomaanslagen in Moskou aan extremistische Tjetjenen toegeschreven.. De Russische president Putin greep dit aan om een  tweede oorlog te beginnen. Nog bloediger en met nog meer geweld. Grozni werd helemaal in puin geschoten. Maar de buitenwereld had er heel weinig aandacht voor.

 

De Nekker : En toen kwam 11 september 2001.
Murat Daoudov: Zeker, Rusland stelde haar strijd voor als onderdeel van de internationale campagne tegen het moslimextremisme. Hierdoor kan het de bezetting blijven legitimeren. Er is een zeer sterke aanwezigheid van extremisten in Tjetjenie.  Maar men mag nooit vergeten dat de oorsprong van de strijd  een nationalistische basis had om de eigen cultuur, taal en religie te laten overleven.  Spijtig genoeg hebben de fundamentalisten de  bovenhand gehaald omdat ze heel wat steun kregen uit andere landen

 

De Nekker: En nu ?
Murat Daoudov: Ik zie het somber in.  De buitenwereld is niet geïnteresseerd. De Russen bezetten Grozni als een  stad in oorlog en ik vrees dat mijn land, net als Afghanistan vergelden is in een duistere spiraal van geweld en extremisme. Teruggaan kan ik niet.  Er wonen nog familieleden in Grozni maar ik heb slechts onrechtstreeks met hen contact. Vele andere familieleden wonen elders in de wereld.

 

De Nekker: Maar hoe kwam je in België?
Murat Daoudov: In mijn studententijd was ik al politiek actief  in de strijd tegen de Russische bezetting. Ik moest echter Turkije verlaten om deze redenen. En kwam zo naar Belgie. Eerst werd ik  opgevangen in een Rode Kruiskamp in Yvoir. Daar kon ik Frans leren van Rwandese vluchtelingen. Nadat ik politiek asiel kreeg, kwam ik naar Brussel. Eerst Schaarbeek en daarna Laken. Hier heb ik Nederlands geleerd.

 

De Nekker: Niet evident voor een Tjetjeen.
Murat Daoudov: Toch wel, het spreken van de beide landstalen is de minimale vorm van respect die men kan opbrengen voor de gastvrijheid van beide gemeenschappen in België. Ook het contact dat nodig is om met de belgen samen te leven kan alleen maar via jullie talen.

 

De Nekker: Je bent ook maatschappelijk geëngageerd.
Murat D.: Heel jong had ik al interesse in het werken aan een  betere samenleving. De journalistiek én politiek leken mij ideale kanalen hiertoe. Ik  heb me na mijn aankomst heel wat ingezet voor het Comité Tjtejenie - Belgie. We kregen heel wat steun van vele Belgische parlementsleden. Maar langzaam aan heb ik vanwege het haast hopeloze van de strijd en ook uit angst voor mijn eigen veiligheid me steeds minder ingezet met de oorlog in mijn land..

 

De Nekker: Vandaar dat je nu interesse hebt voor het Belgische politieke leven?
MuratD. Ik ben lid geworden van de Raad voor Brusselse van Vreemde Origine. Het allereerste lid overigens uit een voormalige Sovjetrepubliek. In de Raad  zie je pas wel een mozaiek Brussel is. De meest uiteenlopende culturen tref hier aan.

 

De Nekker: Toch niet een  beetje angst dat de Raad vooral papieren werkt zal leveren.
Murat: Ja, wat ik vernam was dat het vroeger dit wel zo was. Maar de jonge Brusselse schepen De Lille wil aan de kar trekken om de Raad effectief te laten werken. Ik gun het hem wel.   

 

De Nekker. Je spreekt haast perfect Nederlands, je hebt een  job, je bent sociaal actief. Het voorbeeld van een goed geintegreerde politiek vluchteling.   
Murat: Inburgeren is zeer belangrijk. Dat kan enkel door het leren van de lokale talen en de lokale cultuur voor een deel op te nemen. Alleen vrees ik dat een verplichte inburgering, zeker bij politieke vluchtelingen, een beetje omgekeerd werkt. Zij  komen uit landen waar alles verplicht was. België is voor hen een land van vrijheid.  Dus een verplichting werkt voor hen eerder remmend. België zou er alles moeten aan moeten doen hen te sensibiliseren en te overtuigen vrijwillig de stap te zetten. Een belangrijk factor hierin zou het geven van  gemeentelijk stemrecht zijn. Bovendien is dit een echte
investering in al deze mensen.

 

De Nekker. Maar je kan toch op een  vrij eenvoudige wijze Belg worden. En dan  mag je aan alle verkiezingen deel nemen.
Murat D: Ik ben een beetje bang dat België met de soepele naturalisatiewetgeving haar nationaliteit te grabbel legt en het als een banaliteit weggeeft. Het aannemen van een  andere  nationaliteit is lang proces en kan niet verworden tot een eenvoudige administratieve procedure.

 

De Nekker: Hier hoor ik een politieker in wording spreken.
Murat D: Heel wat migranten en vluchtelingen zijn bereid om mee aan de kar te trekken. Ikzelf ook, omdat ik  zie dat er heel wat fout loopt in de buurt waar ik woon (nvdr nabij de Marie Christinastraat). Veiligheid en netheid zijn iets waar alle bewoners belang aan hechten. De democratische politieke partijen moeten begrijpen dat heel migranten met dezelfde vragen zitten. De traditionele partijen moeten begrijpen dat extremistische partijen enkel groot kunnen worden omdat men teveel zaken in een taboesfeer laat. Ik heb angst dat ook heel wat allochtonen ook voor extremistische partijen zullen stemmen als aan thema’s als veiligheid niet echt gewerkt wordt.

 

De Nekker. Murat, dan hebben mensen zoals jij een heel belangrijke taak om als tolk dit naar de Belgische politiek te vertalen.

 

Rik Fobelets  

http://nekkersdal.vgc.be/nekker.asp

13:10 Posted in Who's who? | Permalink | Comments (0)